Dans une longue lettre à François Hollande, le Dr Marie-Noëlle Philippe, médecin généraliste à Douarnenez, sollicite la « grâce » présidentielle dans une affaire de non-respect des ordonnances dites « bizone » qui permettent de distinguer clairement les prescriptions en rapport ou non avec une affection de longue durée (ALD) exonérante (seuls les soins et prestations prescrits sur la partie haute de l’ordonnance seront remboursés à 100 % au titre de l’ALD).
« Travaillant près de 12 heures par jour, je ne faisais qu’aider certains malades désargentés dépourvus de mutuelle et ne souhaitant pas avoir à faire l’avance de certains frais (...) » écrit le médecin généraliste auquel sa caisse primaire réclame aujourd’hui plus de 4 000 euros (2 500 euros au titre du préjudice pour la Sécu et 1 500 euros d’amende) pour des litiges sur le « bizone » remontant à 2010.
Jointe ce vendredi par le « Quotidien », la généraliste, 60 ans, se dit victime du « stress, de la charge de travail, de la pression des patients », allant parfois jusqu’au « vent de panique ». « Quand on est dans le feu de l’action, on n’a pas toujours le temps de réfléchir », précise-t-elle, tout en reconnaissant avoir commencé à rectifier ses ordonnances depuis quelques mois.
Soigner les malades ou la Sécu ?
Sur le fond, elle dénonce un système « ahurissant » qui pousse à « soigner la Sécu avant de soigner les malades » et qui rétribue les médecins « "à la performance" s’ils acceptent de rentrer dans un certain cadre ». Aujourd’hui, « c’est comme si on me soupçonnait d’avoir pris de l’argent dans la caisse, ce qui est extrêmement désobligeant », ajoute ce médecin qui a également alerté les journaux locaux et son assureur.
Travaillant depuis « 33 ans », précise-t-elle dans son courrier à l’Élysée, le Dr Philippe affirme que ce genre de contentieux avec la Sécurité sociale pousse directement les jeunes à fuir l’exercice libéral. « Les déserts médicaux ne sont pas près d’être repeuplés ce qui est dramatique pour notre profession et surtout pour les malades », écrit encore ce médecin pour qui la médecine libérale « est en passe de faire partie du passé ».
Outil controversé.
Au-delà du cas particulier, l’affaire relance la polémique sur le dispositif controversé de l’ordonnancier « bizone », un outil de régulation source de nombreux litiges entre les caisses primaires et les médecins libéraux. En 2009 et 2010, le Dr Didier Poupardin, médecin généraliste à Vitry (Val-de-Marne), avait largement médiatisé sa « croisade » contre l’ordonnancier bizone qui « découpe les malades en tranches », recueillant des milliers de signatures en sa faveur et, au-delà, sur le thème de l’accès aux soins.
Plusieurs syndicats de médecins généralistes ont réclamé ces dernières années des aménagements au « bizone » ou même sa suppression.
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