APRÈS LA RETENTISSANTE étude publiée l'an dernier, qui annonçait, à partir d'un modèle biomathématique, la prochaine fin de l'amélioration des records du monde (« le Quotidien » du 7 février), voici une nouvelle livraison de l'IRMES qui ne devrait pas non plus passer inaperçue : intitulée « Variabilités de la performance au cours de l'ère olympique », elle se penche sur l'évolution de l'écart des records olympiques entre hommes et femmes, le « Gender Gap ». L'équipe du Pr Jean-François Toussaint a mis la barre statistique plus haut que l'an dernier, modélisant 13 000 écarts (contre 3 0000 pour la précédente étude). «Nous avons exclu toutes les disciplines structurellement non comparables», précise Valérie Thibault, qui présentera mercredi cette communication, dans le cadre du 3e symposium de l'IRMES, devant la commission médicale du Comité national olympique et sportif français. Haltérophilie, lancer de marteau, de même que les sports qui font appel à des technologies spécifiques (aviron, voile, automobile), sortent du champ de l'étude qui a finalement retenu quatre disciplines : athlétisme, natation, patinage de vitesse et cyclisme. Ont été analysées les différences entre hommes et femmes pour les records du monde et les dix meilleures performances chaque année depuis 1908 jusqu'aux JO de Pékin.
Pour les sept premières décennies, les écarts observés se resserrent. Parties plus tard, les femmes ont des marges de progression supérieures aux hommes. Et c'est précisément en mettant en ligne ces évolutions que plusieurs études, dans le passé, ont pu pronostiquer que, à terme, les femmes non seulement rattraperaient un jour les hommes sur les stades, mais encore les y laisseraient sur place.
Extrapolation hasardeuse.
Dernière en date de ces publications, l'article, en 2004, d'Andrew J. Tatem (département de zoologie de l'université d'Oxford) et Simon Hay (Public Health Group de Nairobi), dans « Nature » (431, 525). À partir des deux remarquables lignes droites dessinées par les records masculins et les records féminins au 100 m, au cours des cent dernières années, les auteurs ont calculé que les deux lignes allaient finir par se croiser : au plus tôt aux jeux Olympiques de 2064 et au plus tard à ceux de 2788. Au-delà, l'article concluait en prophétisant que «l'être humain le plus rapide sur la planète serait une femme».
«Pour notre part, nous nous abstiendrons de toute prédiction, tient à souligner Valérie Thibault, tout en jugeant «absurdes» les études qui, «en prolongeant les courbes de progression des records finiraient par annoncer un temps de 4secondes pour courir le 100m!»
En fait, l'équipe du Pr Toussaint, après avoir mesuré le resserrement du Gender Gap jusqu'aux années 1970, a constaté ensuite la fin de la variabilité des écarts hommes-femmes. «Depuismaintenant trente ans, annonce Valérie Thibault, les écarts restent étonnamment stables. Quand les hommes progressent dans une discipline, les femmes aussi et avec la même pente. Et quand les hommes ont cessé d'améliorer leurs records, les femmes stagnent également.»
Trente ans, c'est long, ce n'est pas anodin, c'est même probant, disent les biostatisticiens de l'IRMES. C'est la revue « PLoS One » qui devrait publier le détail statistique de ce travail, fin 2008 ou début 2009.
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