L'ÉLYSÉE n'a rien laissé au hasard, ni le lieu ni la date. C'est après avoir visité la maison de santé de Bletterans (Jura), un « modèle » emblématique de prise en charge pluridisciplinaire en soins primaires (lire ci-dessous), que Nicolas Sarkozy, accompagné de Roselyne Bachelot, délivrera aujourd'hui, à 12 h, un des grands discours qu'il affectionne sur «la politique de santé et la réforme du système de soin».
Côté agenda, ce déplacement présidentiel intervient alors que le ministère de la Santé a entamé cette semaine une délicate phase de concertation, «stylo à la main», sur le projet de loi Hôpital, patients, santé et territoires. Ce texte qui révolutionne l'organisation territoriale de la santé, en confiant un pilotage régional unifié aux ARS, percute l'ensemble du secteur et provoque immanquablement de fortes inquiétudes, des libéraux aux hospitaliers, depuis les services déconcentrés de l'État jusqu'à ceux de l'assurance-maladie. Pour le chef de l'État, il n'est pas superflu dans ce contexte où les nerfs sont à vif de conforter publiquement l'action de Roselyne Bachelot et de rappeler les priorités de l'action gouvernementale.
« Piqûre de rappel ».
Personne n'a été négligé aujourd'hui. Nicolas Sarkozy a convié en terres jurassiennes le « gratin » du secteur : les responsables des syndicats de médecins libéraux (y compris les chirurgiens de l'UCDF qui organisent un mouvement de contestation le 4 octobre), des grands régimes de Sécurité sociale (CNAM, MSA, indépendants), la Haute Autorité de santé (HAS), des usagers (CISS), mais aussi toute la communauté hospitalière, grandes fédérations (FHF, FEHAP, FHP), centres de lutte contre le cancer (FNCLCC), conférences et enfin syndicats de PH (l'oubli initial a été réparé sur ce point).
Si la forme a été soignée, c'est évidemment le fond du discours présidentiel qui sera disséqué. Outre des accents volontaristes sur les ARS, versant le plus escarpé de la loi Bachelot, et une piqûre de rappel sur l'incontournable réforme hospitalière ( «dans la droite ligne des interventions précédentes et de la mission Larcher», précise-t-on de bonne source),le discours de Nicolas Sarkozy mettra l'accent, cette fois, sur l'accès aux soins primaires et sur le rôle des professionnels qui interviennent en première ligne au premier rang desquels les médecins généralistes. «Nous avons transmis à l'Élysée des éléments de langage en ce sens, mais ce sont eux qui rédigent et font leurs choix», indique-t-on prudemment dans l'entourage de Roselyne Bachelot. Il n'empêche. Le chef de l'État devrait donc remettre à l'ordre du jour les thématiques qui avaient dominé les états généraux de l'organisation de la santé (EGOS). «Le déplacement dans une maison de santé modèle est tout sauf un hasard», indique-t-on au ministère.
Pour certains observateurs, le fait d'avoir choisi le Jura, non loin des terres du président de MG-France, est une forme de signal politique.
Nicolas Sarkozy devrait en tout cas vanter les mérites des pratiques pluridisciplinaires coordonnées, de la coopération interprofessionnelle autour du patient ou encore défendre l'intérêt des nouveaux schémas régionaux d'organisation des soins (SROS) élargis à la médecine ambulatoire, prévus dans la loi Bachelot mais qui inquiètent les médecins.
L'évolution de la médecine de ville en filigrane.
Le chef de l'État est particulièrement attendu sur deux sujets cruciaux : la démographie et la régulation des dépassements d'honoraires. Dans tous ses discours précédents sur la santé, le président de la République a empoigné ces sujets, non sans fermeté. Les élus locaux lui réclament des mesures fortes, opérationnelles. Sur la démographie et les dépassements, «le chef de l'État veut maintenant des résultats», confirme-t-on au ministère de la Santé . Lesquels ? «Il faut se souvenir que les infirmières ont signé un accord historique [les syndicats ont accepté de renoncer à la liberté totale d'installation]», analyse-t-on.
Dans l'entourage du directeur de l'assurance-maladie, on n'excluait pas que le propos présidentiel aborde «les grandes évolutions de la médecine de ville, y compris la manière de voir les négociations conventionnelles». Son déplacement, analyse-t-on du côté de la CNAM, «peut se voir comme un geste fort de confiance à la médecine libérale, et aux initiatives des médecins de terrain, mais attention, ce sera du donnant/donnant...».
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