DE NOTRE CORRESPONDANTE
« NOUS SOMMES parfois réticents à les voir s'occuper de nos affaires, mais il faut trouver un moyen d'impliquer les usagers à l'hôpital. »
En s'exprimant ainsi, le directeur des Hospices civils de Lyon (HCL), Benoît Leclercq, ne pouvait mieux situer le débat engagé par son institution. Depuis le plan Juppé, les usagers sont en effet censés siéger dans les hôpitaux. Alors que l'AP-HP compte aujourd'hui deux représentants des patients par sites, les HCL n'en ont que deux pour la vingtaine d'établissements qu'ils regroupent. Or, toutes les enquêtes révèlent « le manque de dialogue et d'information est ce qui manque le plus à l'hôpital », a rappelé, dans la foulée, le Pr Etienne Tissot, président de la Commission médicale d'établissement. La participation des usagers au sein du CA des hôpitaux peut-elle changer la donne ? Oui, à condition que le partage des responsabilités soit effectif et que les protagonistes parviennent à s'entendre sur la manière de « bien faire » à l'hôpital.
Établir une relation.
« Au départ, c'est très éprouvant », a témoigné Claire Helly*, représentante des usagers au centre hospitalier gériatrique des Monts-d'Or (69), soulignant que la place était loin d'être conquise d'avance. Elle a évoqué les nombreux rapports à lire, la complexité des acronymes usités, l'emprise des prérogatives dans le fonctionnement de l'hôpital, et cette « ère du soupçon » qui sévissait au début de son premier mandat, en 2000. « Bien avant d'oser prendre la parole et aborder un point précis », il lui a fallu s'inviter dans les services pour en connaître les rouages et aller à la rencontre des soignants. « Pour connaître l'hôpital de l'intérieur, rien de tel que d'entrer dans la démarche d'accréditation, a-t-elle poursuivi. J'ai ainsi pu participer à des groupes de travail transversaux sur le droit et l'information des patients », et la création d'un « point rencontre » avec les usagers, dans l'hôpital, devrait en découler.
Comme l'a souligné Jean Wils, chargé des droits des usagers à l'hôpital européen Georges-Pompidou (AP-HP), « les usagers veulent exercer leur citoyenneté à l'hôpital, c'est-à-dire le partage des responsabilités ». Aujourd'hui, il constate que beaucoup d'instances, comme les comité de luttes contre les infections nosocomiales ou de lutte contre la douleur, réclament la présence des usagers. Entre un rôle de potiche, encore fréquent, et une professionnalisation excessive, qui est à craindre, les usagers doivent trouver le juste équilibre.
Volonté politique.
Cet équilibre pourrait d'ailleurs être renforcé par la mise en place des commissions des relations avec les malades et la qualité de prise en charge, censées remplacer les commissions de conciliation, selon la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades. Mais la rédaction des décrets d'applications se fait un peu désirer : « Ce n'est pas une priorité pour le ministère, a déploré Jean Wils. D'ailleurs, dans les textes de la nouvelle gouvernance, on ne parle pas beaucoup des usagers. » Au-delà de ces considérations, il faut reconnaître que la place faite à l'usager dépend en premier lieu d'une volonté politique de l'hôpital. Si l'hôpital Pompidou possède aujourd'hui deux lieux où les usagers, représentants d'associations de malades, peuvent tenir des permanences, c'est que la direction y était hautement favorable. « Il faut parfois savoir anticiper les textes ou jouer sur les marges de la réglementation », a résumé Claire Helly, suggérant que « les HCL suivent le modèle Pompidou ».
* Vice-présidente de l'association France Alzheimer Rhône, membre du Collectif interassociation sur la santé de Rhône-Alpes (Cissra).
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature