SI LE DOUZIÈME ROMAN de Yann Queffélec sort des sentiers battus, c'est plus par son mode de distribution originale que par son contenu. L'ouvrage paraît en effet non chez son éditeur habituel Fayard (où il est malgré tout programmé en automne prochain mais sous une forme un peu remaniée) mais chez France Loisirs, une maison plutôt spécialisée dans la reprise de succès connus. Un club de lecteurs qui ne compterait pas moins de 3,8 millions d'adhérents et qui semble bien décidé à dépasser son image un peu vieillotte et à « se mettre à la page ». C'est ainsi que plusieurs auteurs parmi les plus connus, Françoise Chandernagor, Gilles Lapouge, Jorge Semprun, Jean-Christophe Rufin ou... Yann Queffélec, ont été invités à parrainer des coups de cœur, romans ou nouvelles ; ce dernier a déjà fait publier un texte de Joe Haldeman sur le Vietnam, « les Deux Morts de John Speidel » qui était passé inaperçu lors de sa sortie et il a choisi « Délire d'amour », de Ian McEwan, pour le deuxième trimestre 2004.
Que son roman paraisse en marge des circuits traditionnels de distribution ou non, cela importe peu à Yann Queffélec : « Quand j'écris, dit-il, je ne pense pas plus à mon éditeur qu'à mes lecteurs. J'entre dans un rêve et je n'en sors qu'à la fin. »
Le rêve éveillé de « la Dégustation » lui est venu en visitant, à Moulins, une cave qui, pendant la guerre, a servi à la fois d'entrepôt pour le vin et de salle d'interrogatoire. Il nous transporte alors dans les hauts de Nice, dans la magnifique villa que Bernard Tangor a fait construire à l'emplacement du fort de Bellevue - qui, avant d'être brûlée en 1945, s'appelait Kommandantur -, où la fête du mariage bat son plein.
Qu'est-ce qui réunit ces deux êtres aux antipodes ? Editeur et vigneron, Bernard, qui fait de l'hypertension, ne peut plus boire une goutte : voit-il en Muriel, qui se découvre un « nez » aussi fin que lui, celle qui va lui succéder ?
Quant à elle, se laisse-t-elle séduire uniquement par la prestance de son mari et la belle vie qu'il lui offre ou bien poursuit-elle un but plus obscur en rapport avec le passé, dicté peut-être par sa mère qui n'a pas voulu assister au mariage et qualifie son gendre de « monstre » ? Il ne se passera pas longtemps avant que la belle histoire d'amour ne tourne court et que les héros ne s'affrontent nez à nez.
Une histoire moderne de la Belle et la Bête qui est l'occasion pour l'auteur de nous initier à l'œnologie, mais dans laquelle l'évocation des nectars rares est entachée de souvenirs putrides.
Editions France Loisirs, 283 p., 15,95 euros.
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