POUR CERTAINS, l'avènement des cellules souches pluripotentes induites (SPi) signe la fin des recherches sur les cellules souches embryonnaires (SE) et des problèmes éthiques qui les entourent. Mais de nombreux scientifiques appellent à la prudence. Cesseriez-vous d'utiliser votre ordinateur sous prétexte qu'un nouveau système d'exploitation plus performant est en cours de développement ? Tant que les cellules SPi n'ont pas fait leur preuve, il faut continuer à utiliser les cellules SE.
Sans compter que toute avancée réalisée dans le domaine des cellules SE profitera à celui des SPi.
«Il n'aurait jamais été possible d'obtenir des cellules SPi sans les connaissances acquises grâce à la culture et à l'étude des cellules SE», a rappelé James Thomson, de l'université du Wisconsin, lors d'une interview accordée à « Nature Reports Stem Cells ». L'homme sait de quoi il parle : il a dirigé l'une des deux équipes pionnières dans la production de cellules SPi humaines. Et ce succès, il le doit lui aussi largement à une grande maîtrise des cellules SE. N'oublions pas qu'il s'agit du chercheur qui a dérivé la première lignée de cellules SE de primate non humain en 1995 et la première lignée de cellules SE humaines en 1998.
Thomson croit cependant dur comme fer que les cellules SPi finiront par supplanter les cellules SE dans les applications thérapeutiques. Dans un article paru au début d'août dans la revue « Genes and Development », il imagine même que les cellules SPi ouvriront la voie vers une deuxième génération de thérapie cellulaire : «La thérapie cellulaire se fondant sur l'utilisation de cellules SPi a un potentiel clinique énorme. Mais une vraie médecine régénératrice dirigerait des cellules endogènes afin qu'elles participent à la réparation de tissus endommagés qui ne peuvent normalement se régénérer par eux-mêmes. Cela nécessiterait une modification non physiologique du statut de différenciation des cellules endogènes». Avec la découverte des cellules SPi, «il semble désormais beaucoup plus plausible qu'une telle expérience puisse fonctionner. »
L'idée du chercheur, idée également développée par d'autres spécialistes du domaine, est que, s'il est possible de reprogrammer une cellule en SPi, il doit être possible de la reprogrammer directement, et in situ, en cellule thérapeutique différenciée. Le tout sera d'identifier la bonne combinaison de gènes à activer pour obtenir la régénération de chaque organe, puis le moyen de les activer in situ. Simple en théorie, assez irréaliste en pratique. Au moins pour l'instant.
Interrogé sur ces projets à plus court terme, Thomson, même pas 50 ans et déjà un CV de prix Nobel, a nonchalamment répondu : «J'ai entendu parler de quelqu'un qui détient des fibroblastes de baleine. Cela serait sympa de faire une lignée de cellules SPi de baleine!»
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