PEUVENT-ILS s'entendre ? La séance de négociation du jour permettra de mesurer la capacité des syndicats médicaux et de l'assurance-maladie à accorder leurs violons sur un dossier désormais sous surveillance de l'Élysée : la démographie médicale. Car Nicolas Sarkozy a prévenu les partenaires conventionnels le 18 septembre, lors de son discours dans le Jura : sans «mesures opérationnelles» avant la fin de l'année permettant d'accroître l'offre médicale dans les zones déficitaires, c'est l'État qui «agira».
En revanche, le deuxième sujet initialement à l'ordre du jour de cette réunion, à savoir le secteur optionnel pour les spécialistes de plateaux techniques lourds, a été brusquement « zappé » et renvoyé au 23 octobre. Le conflit interne qui ébranle l'Union nationale des complémentaires santé (UNOCAM, qui réunit mutuelles, assureurs et institutions de prévoyance), empêche pour l'instant toute avancée. «Ce n'est pas la chaise vide mais nous devons procéder à quelques ajustements...», admet-on à l'UNOCAM. Pour certains, le mouvement de colère des chirurgiens (voir nos éditions du 3 et du 8 octobre) ne serait pas totalement étranger au report de l'examen du secteur optionnel.
Des tarifs à la carte ?
S'agissant de la démographie, la pression ne vient pas seulement de l'Élysée.
Les élus locaux réclament des mesures rapides, conventionnelles ou législatives. Dans les rangs des parlementaires, à droite comme à gauche, des voix s'élèvent à nouveau pour suggérer des mesures contraignantes à l'installation. Des amendements seraient même à l'étude. Sentant le vent du boulet, les étudiants (ANEMF), internes (ISNAR-IMG, ISNIH) et chefs de clinique (ISNCCA) ont écrit à Roselyne Bachelot pour l'alerter : pas question, disent-ils, de «sacrifier» une classe d'âge pour corriger les erreurs passées de gestion de la démographie médicale. Ils tiennent à ce que «la solidarité intergénérationnelle» (entre les jeunes et les médecins installés) soit respectée. Surtout, avant d'envisager des mesures de régulation, les jeunes médecins demandent la traduction des incitations décidées lors des états généraux de l'organisation de la santé (EGOS) concernant la formation initiale, les aides à installation et au regroupement, le guichet unique, des solutions pour dégager du temps médical ou encore le financement effectif de maisons de santé pluridisciplinaires.
Quant aux syndicats de praticiens installés, ils font bloc contre d'éventuelles mesures pénalisant les médecins en exercice. Elles restent dans l'air du temps. La CNAM défend le principe d'un «contrat santé-solidarité» dans lequel des praticiens en exercice s'engageraient à maintenir une présence médicale dans des zones sous-dotées proches ( via des consultations avancées, des vacations, un cabinet secondaire, la participation à la PDS ou à des actions de santé publique). La baisse de la prise en charge des cotisations a été envisagée.Le Dr Michel Chassang, président de la CSMF, redoute que les pouvoirs publics n'aient pas renoncé à l' «affichage politique de mesures autoritaires» sur la démographie.
Chacun reste donc sur ses gardes. «Imaginer des mesures contraignantes, comme la modulation de cotisations sociales, tant que l'incitatif n'est pas en place, n'est absolument pas cohérent»,résume le Dr Dinorino Cabrera, président du SML. «Notre priorité doit être de restaurer l'attractivité de la médecine générale, surtout pas de décourager davantage des professionnels qui dévissent déjà leur plaque», martèle le Dr Martial Olivier-Koehret, président de MG-France. Pour la CSMF, «il est urgent de revoir l'avenant n°20 afin de le moduler selon les zones d'exercice plus ou moins déficitaires [ce système de bonus de 20 % dans les zones sous-médicalisées est un échec] ».Dans son discours sur la santé, Nicolas Sarkozy avait jugé «normal» que l'on accorde «des tarifs ou des avantages meilleurs à un médecin qui s'installe à la périphérie de Douai qu'à un médecin qui s'installe dans le centre-ville d'Aix-en-Provence».Mais cette politique de différenciation tarifaire est délicate à mettre en place...
Faute de pouvoir discuter du secteur optionnel aujourd'hui, les partenaires conventionnels devraient examiner les contours des contrats d'amélioration des pratiques individuelles rémunérés « à la performance ». Autre terrain sensible sur lequel les syndicats avancent avec une prudence de Sioux.
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