L'évaluation du malade douloureux chronique en ambulatoire a fait l'objet de recommandations formulées en 1999 par l'ANAES. Depuis lors, il s'avère important de montrer quelles sont les difficultés d'application et d'appropriation de ces recommandations dans la pratique du médecin généraliste .
« D'ores et déjà, remarque le Dr François Bourreau, l'évaluation de la douleur chronique demande du temps, le temps d'explorer les différentes facettes de ce problème douloureux chronique, tant au plan diagnostique qu'au niveau de la prise en charge. Il s'agit de recueillir des informations particulièrement importantes en ce qui concerne le mécanisme de la douleur, son impact en termes d'intensité et de retentissement sur les activités du patient, des difficultés d'ordre professionnel peuvent compliquer la situation, sur son moral. »
Des outils d'évaluation à la carte
C'est pourquoi l'ANAES a proposé un certain nombre d'outils standardisés qui, en complément de l'entretien et de la démarche clinique, permettent de préciser certaines caractéristiques de la douleur. On peut souligner l'intérêt du schéma corporel et de tous les outils d'évaluation de l'intensité douloureuse, avec notamment les échelles visuelles analogiques, les échelles verbales et numériques. Ces outils d'évaluation sont particulièrement précieux sachant que l'importance de l'intensité de la douleur perçue par le malade n'est pas toujours facilement appréciée.
D'autres outils contribuent aussi à cette évaluation, avec notamment un questionnaire d'adjectifs qui étudie le vécu douloureux, et notamment tous les qualificatifs émotionnels émis (douleur angoissante, déprimante...), l'échelle HAD (Hospital Anxiety Depression Scale) pour identifier les malades ayant une composante anxio-dépressive et une échelle d'impact sur le quotidien.
Un entretien indispensable pour mener cette évaluation
Ces outils sont utilisables à la carte lors de l'entretien. Les recommandations de l'ANAES soulignent l'importance de pouvoir effectuer cet entretien, non seulement pour mener cette évaluation, mais aussi pour guider certaines décisions thérapeutiques, qui ne se limitent pas à la prescription de médicaments. Pour l'heure, ces outils d'évaluation sont à la disposition des médecins généralistes, mais remarque le Dr Bourreau, « la difficulté réside dans le fait que certains médecins ne sont pas encore très familiarisés avec les principes actuels de prise en charge du malade douloureux chronique et qu'ils n'ont pas toujours la possibilité de lui consacrer du temps. Alors que cette disponibilité est indispensable pour s'attaquer véritablement au problème. Par ailleurs, il est nécessaire d'utiliser ces méthodes d'évaluation au bon moment, c'est-à-dire au bout de trois à six mois d'une douleur persistante. Et surtout de ne pas attendre quatre à cinq ans pour considérer un patient comme un douloureux chronique alors qu'il est entré dans une chronicité irréversible. »
En pratique, il s'avère important que ces outils proposés par l'ANAES puissent être présentés dans le cadre d'une formation complète, en vue de faciliter l'adhésion des médecins à la démarche proposée au lieu de rechercher des recettes faciles à un problème compliqué. A cet égard, le Dr Bourreau souligne l'intérêt des formations effectuées dans le cadre des réseaux. Pour preuve, l'exemple du réseau 77 (dont le projet était centré sur le rôle du médecin généraliste dans la prise en charge de la douleur) qui a permis aux médecins de se former et de s'approprier les outils d'évaluation. Un autre réseau plus ancien (réseau ville-hôpital avec l'hôpital Saint Antoine) leur a permis de s'entraîner à utiliser ces outils.
D'après un entretien avec le Dr François Bourreau, centre d'évaluation et de traitement de la douleur, hôpital Saint-Antoine, Paris.
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