Mieux vaut naître le jour que la nuit. En tout cas, en Suède. Les enfants mis au monde pendant les périodes nocturnes ont un risque de mortalité majoré, que ce soit dans les premiers jours ou au cours de la petite enfance. Il en va de même pour le décès par asphyxie dans le post-partum précoce. Le danger maximal se situe chez les prématurés, ainsi qu'au moment du changement d'équipe et dans les heures qui suivent.
La notion n'est pas entièrement nouvelle, mais une étude de grande envergure devait la vérifier. Elle apporte des précisions sur les tranches horaires. Curieusement, le travail est publié dans le « British Medical Journal » sous la plume de médecins de Hong Kong (Chine), Z. C. Luo et J. Karlberg, mais porte sur les naissances en Suède. Il faut dire que ce pays scandinave dispose d'un registre des naissances remontant à 1973. Les auteurs ont donc analysé 2 392 263 naissances entre 1973 et 1995. Après élimination des bébés atteints de malformations graves, le travail statistique a porté sur 2 102 324 enfants.
Entre 21 heures et 9 heures
Entre le début et la fin de la période considérée, les bébés nés entre 21 heures et 9 heures ont toujours une mortalité supérieure à celle des bébés nés le jour, que ce soit par asphyxie dans les six premiers jours ou toutes causes confondues en post-partum ou au cours de la petite enfance.
Malgré tout, la mortalité infantile globale a diminué au fil du temps sur ces deux décennies.
L'analyse a été détaillée. Tout d'abord, par périodes : 1973-1979, 1980-1989, 1990-1995. Sans explication, ces cinq dernières années ont été marquées par la mortalité la plus élevée. Les auteurs relèvent, chez les prématurés et par rapport au jour, une augmentation de 30 % de la mortalité néonatale (risque relatif de 1,31) et de 70 % des décès par asphyxie (risque relatif de 1,7). En ce qui concerne l'ensemble des naissances à terme, le risque relatif de décès, à la même période, est de 1,23 la nuit pour la mortalité néonatale et de 1,67 pour l'asphyxie. Les chiffres respectifs pour 1973-1979 et 1980-1989 sont de 1,10 et 1,18 ; 1,05 et 1,04.
L'enquête a ensuite porté sur les jours de la semaine montrant que la différence persiste, que ce soit le week-end ou en période normale de travail.
Restait à déterminer les plages horaires. Deux zones dangereuses sont mises en évidence : de 17 heures à 1 heure et brièvement vers 9 heures. Il s'agit alors surtout d'asphyxies.
Changement d'équipe à minuit
Cette distribution horaire donne une amorce d'explication au problème. La première phase à risque (17 heures-1 heure) débute à la fin de journée de l'équipe de jour et va jusqu'au changement d'équipe à minuit. La seconde zone dangereuse survient juste après que l'équipe de jour prend son service (9 heures). En Suède, les sages-femmes prennent leur service à 7 heures, avec totale prise en charge des parturientes. Les obstétriciens et néonatologistes commencent leur journée à 8 heures. Bien que l'astreinte ou la présence d'un médecin spécialiste varie selon l'importance de la maternité, l'enquête n'a pas mis en évidence de différence entre petites et grandes structures. « Les réponses exactes aux mécanismes et aux causes devront être explorées dans de nouvelles enquêtes », concluent les auteurs.
« British Medical Journal », vol. 323, 8 décembre 2001, pp. 1327-1330.
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