« La nature de l'amélioration montre que le blocage de la myostatine pourrait être bénéfique dans nombre de myopathies primaires et secondaires, telles que les dystrophies musculaires, le vieillissement et l'amyotrophie due aux infections chroniques ou à l'immobilisation. De plus, il pourrait être un adjuvant utile dans la prise en charge de troubles métaboliques systémiques telles que l'obésité ou le diabète. » Les perspectives d'un travail publié dans « Nature » par l'équipe américaine de Sasha Bogdanovich (Philadelphie) semblent importantes, même si, pour l'instant, la recherche ne porte que sur des souris.
Le principe de départ repose sur un constat : les souris et le bétail porteurs d'une mutation du gène de la myostatine (GDF8) montrent une augmentation marquée du poids corporel et de la masse musculaire. D'où l'idée des chercheurs d'inhiber, dans diverses myopathies primaires et secondaires, le produit du gène de la myostatine afin d'accroître la masse musculaire et améliorer le phénotype.
L'expérience a été menée, in vivo, sur des souris mutantes de type mdx, modèle murin de la dystrophie musculaire de Duchenne. Des mâles de 4 semaines ont reçu pendant 3 mois des injections intrapéritonéales hebdomadaires d'anticorps capables de bloquer la myostatine. Un autre lot de souris mdx a subi le même protocole avec uniquement le vecteur des anticorps. Il a servi de témoin.
La majoration est fonctionnelle
Le résultat attendu est survenu, confirmé par diverses mesures. Les souris traitées ont une dépense calorique supérieure, un fait en adéquation avec une augmentation de la masse musculaire et de la taille du corps. Cette majoration est fonctionnelle puisque les souris réalisent mieux certains tests de force physique. Elle est également proportionnelle au volume musculaire. L'augmentation de masse musculaire a été quantifiée après sacrifice des animaux. Les muscles évalués sont effectivement plus lourds après traitement et la prise de poids générale, due au blocage de la myostatine, s'est faite au profit des muscles.
Restait à déterminer si ces nouvelles masses et cette force musculaire sont en relation avec une hypertrophie ou une hyperplasie. Des études morphométriques d'un muscle extenseur mettent en évidence une hypertrophie vraie des fibres musculaires. De plus, argument allant dans le même sens, le nombre de fibres musculaires n'est pas augmenté.
Arguments histologiques et biochimiques
Des étude du diaphragme révèlent moins de dégénérescence chez les rongeurs traités. Enfin, la créatine kinase, qui est constamment élevée en cas de déficience en dystrophine (tant chez l'homme que chez le rongeur), est revenue à la normale au bout de trois mois de traitement. Moindre dégénérescence musculaire et baisse de la créatine kinase fournissent les arguments histologiques et biochimiques de l'amélioration musculaire.
Les auteurs constatent malgré tout que l'inversion des troubles dystrophiques sont incomplets. Certains paramètres physiologiques, évalués ex vivo, n'ont pas été améliorés, par exemple les lésions par étirement. Peut-être est-ce dû au traitement proposé à un mois et non dès la naissance, à un dosage inadapté ou à la stratégie thérapeutique elle-même.
« Par rapport aux approches de thérapie transgénique conventionnelle, cellulaire ou génique, concluent les auteurs, cette étude a utilisé une approche pharmacologique (administration d'anticorps bloqueurs) pour améliorer fonctionnellement le phénotype dystrophique. Délivrer les anticorps bloqueurs par simples injections parentérales contourne le besoin de créer des vecteurs viraux spécialisés pour délivrer les gènes. Plus encore, notre approche devrait résoudre les problèmes de toxicité ou de réponse immune contre le vecteur, objet de préoccupation dans des essais thérapeutiques récents utilisant une thérapie génique conventionnelle. »
« Nature », vol. 420, 28 novembre 2002, pp. 418-421.
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