Mucoviscidose : la tobramycine inhalée pourrait éradiquer le pyocyanique

Publié le 23/09/2001

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Plus de 80 % des personnes atteintes de mucoviscidose ont une infection chronique à Pseudomonas aeruginosa qui contribue à l'altération de la fonction pulmonaire. Cette infection est particulièrement difficile à éradiquer car la bactérie a la capacité de se transformer en un phénotype producteur d'une matrice mucoïde dans laquelle les antibiotiques pénètrent difficilement.

Dès la pénétration

Dans ces conditions, il est logique de traiter les patients le plus précocement possible, c'est-à-dire dès la pénétration des germes dans les voies aériennes, avec des antibiotiques actifs sur les variants non mucoïdes.
Deux petits essais de traitement précoce, l'un par une bithérapie colistine inhalée/ciprofloxacine per os, l'autre par tobramycine inhalée seule avaient déjà réussi à retarder l'infection chronique à P. aeruginosa, mais on ne savait pas si ces deux stratégies avaient éradiqué la bactérie. En effet, aucun suivi tant bactériologique qu'immunologique (anticorps anti- Pseudomonas) au long cours n'avait été pratiqué pour vérifier l'absence de la bactérie.

Deux prélèvements bactériens positifs

L'étude publiée cette semaine dans le « Lancet » vient combler cette lacune, car l'efficacité du traitement par tobramycine inhalée a été confirmée par culture bactérienne et dosage d'anticorps.
Quinze patients âgés de 1 à 15 ans chez lesquels du pyocyanique avait été détecté pour la première fois ont été inclus dans l'essai de l'hôpital d'Essen (Allemagne). Le diagnostic microbiologique de l'infection avait été fait à l'examen de l'expectoration (n = 7) ou d'un prélèvement de gorge (n = 8). Afin d'exclure les colonisations transitoires des voies aériennes par la bactérie, les investigateurs n'ont retenu que les patients présentant deux prélèvements bactériens positifs à un mois d'intervalle. La notion d'infection préalable à P.aeruginosa (preuve bactériologique, traitement antibiotique antérieur) était un critère formel d'exclusion. Pour les patients retenus, le protocole d'antibiothérapie était alors immédiatement débuté sous la forme de deux d'aérosols de 80 mg de tobramycine par jour pendant douze mois. L'étude était ensuite prolongée par un suivi clinique et biologique de deux ans. Durant toute la période de l'essai (trois ans), aucun autre traitement actif sur le pyocyanique n'a été administré.
Pendant les deux ans de suivi, le germe a été recherché dans l'expectoration ou le prélèvement profond de gorge tous les trois mois, de même que les anticorps dirigés contre les antigènes (élastase, exotoxine A et protéase alcaline) de P.aeruginosa par méthode ELISA. La capacité vitale et le VEMS des sujets de plus de 6 ans ont également été comparés avant et après traitement.

14 patients sur 15 indemnes de l'infection

A l'issue des douze mois de tobramycine, tous les patients avaient des prélèvements négatifs, sauf un pour lequel l'antibiotique a été poursuivi trois mois jusqu'à négativation des cultures. A un an, 14 patients sur 15 étaient toujours indemnes de l'infection (culture du prélèvement de gorge négative et absence d'anticorps). A deux ans, 9 sujets n'avaient toujours pas développé d'anticorps.
Les sujets traités pendant un an par tobramycine avaient une capacité fonctionnelle respiratoire inchangée (par rapport au début de l'étude).
« Ces résultats montrent que deux aérosols quotidiens de tobramycine sont capables d'éradiquer le pyocyanique des voies respiratoires des personnes souffrant de mucoviscidose, à condition de débuter dès la colonisation, expliquent les investigateurs. La voie aérienne qui évite les complications de la voie intraveineuse rend possible une telle prophylaxie au long cours. »

Félix Ratjen et coll., « The Lancet », vol. 358, 22 septembre 2001.

Dr Catherine DESMOULINS