On sait qu'à l'origine de la mucoviscidose, se trouve, dans la plupart des cas, une anomalie génétique (mutation delta F508) portant sur le gène CFTR, qui code un régulateur de la conduction transmembranaire (CFTR pour Cystic Fibrosis Transmembrane Conductance Regulator). Normalement, CFTR fonctionne comme un canal chlore, mais il a d'autres effets pléiotropiques (plusieurs fonctions déterminées par un même gène) sur d'autres transports ioniques, y compris sur le canal sodium.
La colonisation de l'épithélium pulmonaire
La mortalité et la morbidité importantes de la mucoviscidose sont liées aux infections respiratoires chroniques, dont le principal responsable est Pseudomonas aeruginosa. Le lien entre les anomalies de CFTR et la colonisation des épithéliums pulmonaires par Pseudomonas aeruginosa fait l'objet d'études, mais il n'a pas été élucidé.
Un certain nombre de modèles ont été avancés, notamment une augmentation de la concentration sodée, une diminution des volumes des fluides, une dyskinésie ciliaire, etc.
Signé de J.-F. Poschet et coll., un travail propose une nouvelle explication qui a le double mérite d'être simple et de fournir une hypothèse pour un essai de traitement.
Les auteurs trouvent une explication moléculaire au défaut de glycosylation associé aux CFTR anormaux. La glycosylation est la modification principale des protéines au cours de la traversée de l'appareil de Golgi, aboutissant à des composés glycoconjugués (glycoprotéines), étape essentielle de la maturation des protéines. Les glycoprotéines sont ensuite conduites vers la membrane plasmique de la cellule dans des saccules du Golgi. Les protéines ainsi formées et transportées participent à l'architecture de la membrane cellulaire et garantissent son fonctionnement.
Dans la mucoviscidose, les glycoprotéines (tout comme les glycolipides) altérées fonctionnent comme des récepteurs d'adhésion pour des agents pathogènes, dès les étapes les plus précoces de la maladie.
Les auteurs ont utilisé un mode d'imagerie faisant intervenir une protéine fluorescente verte sensible au pH. Ils l'ont appliqué à une lignée cellulaire épithéliale bronchique provenant d'un malade atteint de mucoviscidose, portant deux mutations sur les allèles du gène CFTR, delta F508/W128X, puis à une lignée cellulaire provenant d'un malade homozygote delta F508/delta F508.
Une adhérence élevée de P. aeruginosa
Ils montrent que le réseau trans de l'appareil de Golgi (TGN pour trans Golgi Network), qui intervient dans la glycosylation, est en état d'hyperacidité. Cette hyperacidité induit un défaut de liaison aux molécules de sucre appropriées pour former des glycoprotéines normales. La membrane ne fonctionne pas normalement, avec notamment une adhérence élevée de Pseudomonas aeruginosa.
Les auteurs pensent que certaines enzymes qui président à la glycosylation (sialyltransférase) et attachent les molécules de sucre à la surface des protéines ne sont actives que dans des conditions optimales de pH.
Ils ont testé leur hypothèse. En incubant les cellules respiratoires anormales avec une base faible, ils obtiennent une correction de l'hyperacidification du TGN, de l'anomalie de la glycosylation et de l'augmentation de l'adhérence de Pseudomonas aeruginosa.
Aérosols de bases faibles
« Les conditions optimales de pH peuvent être perturbées par une acidification ou une alcalinisation du milieu », constatent-ils.
D'où l'idée qu'une correction du pH, à l'aide de bases faibles données en aérosol, pourrait conduire à une restauration de l'activité de la sialyltransférase. Idée intéressante et facile à tester.
J. -F. Porchet et coll. « Proc Natl Acad Sci USA », édition online (20 novembre 2001), 10.1073/pnas.241182598.
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