« Depuis trente ans que nous essayons de soigner des populations laissées-pour-compte, nous sommes devenus incapables de dire à nos malades : "Non, vous ne pourrez pas guérir" », dit le Dr Jean-Hervé Bradol, président de MSF France. « En même temps, on ne pouvait plus se contenter de dénoncer la faillite des autres », ajoute-t-il.
Maladie du sommeil, maladie de Chagas, leishmaniose viscérale, mais aussi paludisme ou tuberculose : c'est pour se donner de nouvelles armes contre ces maladies négligées des pays du Sud que MSF a lancé la Drugs for Neglected Disease Initiative (DNDI).
Les constats sont alarmants. Les maladies infectieuses font 17 millions de victimes par an, dans les pays les plus pauvres à 90 %. Faute de marché, sur les nouveaux médicaments lancés entre 1975 et 1999, seulement treize concernent des maladies tropicales. « Il s'agit d'un problème humanitaire gravissime et nous devons nous inscrire dans une logique de développement durable », souligne le Pr Philippe Kourilsky, directeur général de l'Institut Pasteur.
Avec Pasteur et l'OMS
MSF s'est donc associé pour cette action avec l'Institut Pasteur, l'OMS, la fondation Oswaldo Cruz au Brésil, l'Indian Council for Medical Research et le ministère de la Santé de Malaisie. « A l'OMS, on a appris qu'il est toujours plus efficace de travailler en partenariat », confirme le Dr Carlos Morel, du programme spécial de recherche et de formation sur les maladies tropicales.
MSF poursuit la campagne engagée en 1999 « pour l'accès aux médicaments essentiels ». Elle complète son action de lobbying auprès de grands groupes pharmaceutiques avec une nouvelle stratégie. « Pour ces maladies, on dispose d'une production scientifique de très grande qualité et d'un volume important, mais peu d'industries s'attachent à transformer cette connaissance en progrès technologique », explique Yves Champay, coordonnateur du DNDI. C'est pourquoi la fondation, en cours de création, se donne pour objectif de monter ou de coordonner des programmes de recherche en vue de l'identification et du développement de nouvelles molécules thérapeutiques. Elle cherchera à identifier des médicaments existants (antibiotiques, antiparasitaires) susceptibles d'être utilisés pour traiter ces pathologies après le développement de nouvelles indications et amélioration des formes pharmaceutiques existantes. Les maladies choisies - dans un premier temps - par le DNDI sont des pathologies géographiquement localisées : la trypanosomiase affecte chaque année 500 000 personnes en Afrique, la maladie de Chagas menace un quart de la population de l'Amérique latine et la leishmaniose touche 12 millions de personnes dans les pays tropicaux. « Nous savons que nos objectifs sont réalistes, car nous avons déjà nettoyé la moitié de l'Ouganda de la maladie du sommeil en collaborant avec les autorités sanitaires de ce pays », explique Jean-Hervé Bradol. La fondation, de droit suisse, sera officiellement créée en juillet 2003 et sera habilitée à recevoir des dons.
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