Selon une étude de Médecins sans Frontières (MSF) portant sur une centaine de personnes suivies entre 1997 et 2000, les étrangers atteints d'une pathologie grave méritent toutes les attentions conjuguées des autorités sanitaires et des services de police.
Arrivés en France (plus de 80 % avec un visa) pour des raisons politiques ou économiques, voire pour poursuivre des études, ils ont appris, en l'occurrence par les soins de MSF, longtemps après leur installation sur le territoire national (quatre ans en moyenne), qu'ils étaient porteurs d'une lourde affection : cancer, HIV, cardiopathie importante et polyarthrite, pour ne citer que les cas les plus fréquents. Agés en moyenne de 36 ans, ils appartiennent à 24 nationalités représentant les cinq continents. Six pour cent d'entre eux sont décédés pendant leur régularisation (6 mois de délai), ou peu de temps après. Car si ces femmes et ces hommes (à proportions égales) sont arrivés avec des papiers, ils en étaient démunis quelques années plus tard, comme a pu le constater l'ONG française.
La loi du 11 mai 1998, dite loi Chevènement, a permis aux étrangers extracommunautaires souffrant d'une pathologie grave, reconnue par expertise médicale (DDASS), de bénéficier d'un titre de séjour d'une durée d'un an, renouvelable sur avis de médecin inspecteur de la santé publique, et par là même de droits sociaux et d'un accès au travail. Depuis cette loi, le ministère de l'Intérieur régularise chaque année 1 500 personnes qui ne pourraient pas être prises en charge médicalement dans leur propre pays.
Mais la France est la seule, au sein des Quinze, à disposer d'une telle législation de plein droit. Ailleurs en Europe, ce sont quelque 10 000 étrangers non communautaires lourdement affectés dans leur santé (au minimum) qui sont tributaires de mesures humanitaires discrétionnaires relevant du bon vouloir de l'administration. Au Royaume-Uni, un texte non législatif d'avril dernier émanant du ministère de l'Intérieur, demande à l'administration britannique d'être bienveillante. En Belgique et en Allemagne, une tolérance veut que les étrangers concernés se voient accorder une suspension temporaire de renvoi dans leur pays. Mais dans les faits, tous sont sous la menace permanente d'une expulsion, et donc d'un arrêt des soins.
Un réseau européen pour la prise en charge
Aussi, face à ce vide en matière de droits de l'homme, c'est une organisation non gouvernementale qui appelle les instances de Bruxelles à intervenir. Depuis le traité d'Amsterdam de 1999, l'Union européenne a compétence en matière d'immigration. Une directive reprenant sous une forme améliorée la lettre et l'esprit de la loi française serait la bienvenue. « Un titre de séjour d'un an, ce n'est pas toujours suffisant pour traiter un cas lourd », fait remarquer MSF. Dans cette attente, Médecins sans Frontières veut impulser la création d'un Réseau européen pour la prise en charge médicale des étrangers. Au total, pour l'association humanitaire, qui organise un colloque sur le sujet à Paris le 10 octobre*, en présence d'ONG et de parlementaires européens, l'heure est à l'Ideme, l'Intervention pour les droits des étrangers malades en Europe.
* Espace de Reuilly, Paris 12e. Tél. 01.40.21.29.29.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature