MÊME les dermatologues américains affichent toujours un certain enthousiasme pour la cosmétologie : la dermatologie clinique fait un retour en force. Alors que le psoriasis et les dermatoses inflammatoires bénéficient des progrès de la recherche thérapeutique, des évolutions diagnostiques s'appliquent à la cancérologie.
Les biothérapies s'imposent.
Les immunosuppresseurs, tels que le méthotrexate, ont toujours leur place. Mais l'arrivée des biothérapies pour le psoriasis a marqué indiscutablement ces trois dernières années. Issues des techniques de génie génétique, elles ciblent toutes le lymphocyte T. «Aujourd'hui, les essais ne cessent de se multiplier, avec notamment les anti-TNF alpha (étanercept, infliximab) dans différentes formes cliniques du psoriasis, mais aussi dans des indications plus rares telles que la pelade, explique le Pr Joly. «Tous les espoirs sont permis avec l'avènement de nouvelles molécules comme un interféron pégylé ou l'anti-L23, dont l'efficacité pourrait permettre des administrations espacées (une sous-cutanée tous les deux mois). » Notons tout de même que l'association vitamine D-corticoïde local, déjà bien implantée en Europe dans le psoriasis, fait son entrée aux Etats-Unis.
La PTD ouvre des perspectives.
La cancérologie tire aussi son épingle du jeu des essais thérapeutiques. L'expérience des Etats-Unis concernant la photothérapie dynamique (PTD) sur les carcinomes basocellulaires traverse l'Atlantique. «Elle s'applique aux lésions très superficielles et donne des résultats esthétiques extraordinaires par son effet de lissage sur la peau, précise le Pr Joly. Cet avantage fait qu'elle est tirée inéluctablement vers la réjuvénation.» Inconvénients : la crème chromophore doit être appliquée plusieurs heures au préalable ; elle est d'un coût élevé ; l'irradiation lumineuse qui permet dans un second temps de tuer les cellules cancéreuses qui ont absorbé le chromophore est douloureuse. Il faut donc la voir actuellement comme un traitement complémentaire de la chirurgie et de la cryochirurgie. La PTD est testée dans les acnés modérément inflammatoires. «Mais, pour l'heure, les résultats obtenus ne semblent pas susciter l'engouement des dermatologues français», souligne le Pr Joly.
La dermatite atopique livre ses secrets.
La dermatite atopique intéresse beaucoup la recherche. La découverte d'une mutation sur le gène de la filagrine explique la plus grande perméabilité de la couche cornée aux allergènes. Le lien est donc établi entre des prédispositions génétiques et des facteurs environnementaux. On sait que la spongiose, qui est le mécanisme de base de la dermatite atopique, dépend de l'apoptose (mort cellulaire programmée). Enfin, davantage de recul permettra de confirmer que l'administration d'inhibiteurs des calcinorines (tacrolimus) dans la dermatite atopique n'augmente pas la survenue de lymphomes chez l'enfant. «Les cas décrits par la FDA relèveraient d'une dérive quant aux indications et du non-respect de l'âge minimal d'utilisation (2 ans). »
Par ailleurs, le rôle des sels de gadolinium dans les produits de contraste des IRM fait l'objet d'une attention toute particulière de l'Afssaps** dans la survenue de fibrose systémique néphrogénique chez les patients en insuffisance rénale sévère.
La dermatoscopie devenue indispensable.
«Toute une sémiologie est née avec la dermatoscopie, devenue un outil diagnostique indispensable. Elle est à la portée de tous et améliore la spécificité du diagnostic en permettant de distinguer ce qui est mélanocytaire de ce qui ne l'est pas (kératoses actiniques, kératoses séborrhéiques…). Des exérèses inutiles sont ainsi évitées. Les plus compétents peuvent augmenter la sensibilité de leur diagnostic. Elle confirme le caractère malin d'une lésion peu atypique. Mieux encore, la vidéodermatoscopie offre la possibilité d'effectuer des comparaisons dans le temps.»
Concernant les nævus congénitaux, une récente métaanalyse estime que les risques de dégénérescence sont globalement de l'ordre de 2 %, avec un risque plus élevé pour les formes géantes. La médiane de survenue serait de sept ans, avec une moyenne à l'adolescence (12-13 ans). «Il ne faut donc pas abandonner les exérèses, tient à rappeler le Pr Joly, et préférer les retraits itératifs pour les plus étendus plutôt que le curetage superficiel.» Ce sont les cellules en profondeur qui dégénèrent. Enfin, la dégénérescence n'est pas forcément là où on l'attend. «En effet, si 70% surviennent sur le nævus congénital, 15% apparaissent en dehors et les 15% autres sont des métastases qui ne sont pas reliées au cancer primitif.»
* CHU Charles-Nicolle, Rouen.
** Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé.
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