LES TOILES de Mondrian sont identifiables entre toutes : fameux damiers et jeux de trames imbriquées, compositions rigides faisant alterner les pleins et les vides, grilles de couleurs primaires formant des poésies chromatiques… Résolument marquées par la non-figuration poussée à son paroxysme, elles sont dénuées de toute présence humaine. Mais la dimension métaphysique et mystique de l’homme les hante. Mondrian n’a cessé d’aller vers l’ascèse, en poussant toujours plus loin la discipline, l’exigence intellectuelle.
Aux scènes champêtres du plat pays que l’artiste réalise au début de sa carrière, dans un style proche du fauvisme et de l’expressionnisme, succèdent des séries de nus et de natures mortes peintes à Paris, où il s’installe en 1912. Peu à peu, le vocabulaire de Mondrian s’épure. Les toiles sont réalisées avec une économie de moyens. Le peintre adopte une facture cubiste et se tourne vers une « décantation de l’image plastique », pour reprendre l’expression du critique d’art Michel Seuphor. Les surfaces sont cloisonnées. Les formes se dissolvent. On parle de « nouvelle plastique abstraite » (ou d’« abstraction néoplasticienne ») pour qualifier cette œuvre, fondée sur la réciprocité des couleurs, de la géométrie et du rythme. Mondrian développera ce langage complexe et cérébral jusqu’à la fin de sa vie, un langage fait d’assemblages dépouillés, de formes d’une rectitude parfaite, de couleurs équilibrées…
L’œuvre de Mondrian s’inscrit dans le courant esthétique hollandais De Stijl, qu’il fonda en 1917 avec Theo Van Doesburg. Ce mouvement d’avant-garde exista pendant quatorze années et regroupa des artistes défendant une organisation mathématique et rigoureuse de l’espace. Leurs idées s’appliquèrent dans tous les domaines de la vie quotidienne, de l’architecture aux arts décoratifs.
L’exposition du Centre Pompidou est gigantesque. Elle rassemble une centaine d’œuvres majeures de Mondrian créées entre 1911 à 1938 et retrace l’histoire passionnante du mouvement De Stijl. L’atelier que le grand maître de l’abstraction occupait à Montparnasse (au 26 rue du Départ) est en outre magnifiquement reconstitué, grandeur nature.
« Pour aller plus loin dans l’art, il faut du travail et de l’humilité. Et puis il faut vraiment quitter la terre », disait Aurélie Nemours, une autre grande figure de l’abstraction, disparue en 2005. La force puissante qui a guidé la création de Mondrian est un mélange de rationalité intellectuelle et d’énergie spirituelle.
Centre Pompidou, tél. 01.44.78.12.33. Tlj sauf mardi, de 11 à 21 heures (jeudi jusqu’à 23 heures). Jusqu’au 21 mars 2011. Catalogue Mondrian, éd. du Centre Pompidou, 360 pages, 49,90 euros + catalogue De Stijl, Centre Pompidou, 320 pages, 49,90 euros.
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