LES SYNDICATS DE CHIRURGIENS orthopédistes (Snco), viscéraux et digestifs (Sncvd) et l’Union des chirurgiens de France (Ucdf) continuent de faire bloc contre l’arrêté «irresponsable», publié le 28 février, qui a radié certains dispositifs médicaux implantables (DMI) de la liste des produits et prestations remboursables (LPP) aux établissements, et intégré ces DMI aux tarifs des cliniques dans le cadre de la tarification à l’activité (« le Quotidien » des 23 mars et 4 avril).
Rassemblés sous les fenêtres du ministère de la Santé au cri de «Chirurgie en péril, malades en danger!»,une soixantaine de professionnels portant blouse et masque, soutenus par quelques représentants d’associations de patients et directeurs d’établissement, ont manifesté contre « la mise à mort »de leur spécialité ; plus précisément contre la perspective d’une chirurgie «bradée, à vil prix», conséquence inévitable, selon eux, du déremboursement des DMI «décidé sans aucune concertation par quelques technocrates».
Une mesure qui oblige, en effet, les cliniques à procéder à des économies sur le coût et la nature desDMIimplantés, au détriment de l’utilisation des techniques chirurgicales modernes (les plus coûteuses), donc de la santé des patients. «Certains établissements demandent déjà aux chirurgiens d’utiliser des pinces au rabais, affirme par exemple le Dr Hubert Johanet (Paris). C’est un retour aux années 1970, on va nous demander de rouler en 2CV...»«Cet arrêté, c’est la mort de l’innovation ! peste un autre . Veut-on, en France, la chirurgie du Burkina?»
Reçue au ministère de la Santé par un conseiller de Xavier Bertrand, une délégation des syndicats protestataires n’a pas été rassurée et a décidé de maintenir la pression. «Nous demandons aux chirurgiens de continuer à travailler comme avant l’arrêté, a expliqué le Dr Jacques Caton, président du Snco, à l’issue de cet entretien. Si ce n’est pas possible, on recommande le report des interventions chirurgicales non urgentes qui utilisent ces matériels.»
« Syndrome CPE ».
Conscients que l’arrêté incriminé n’a aucune chance d’être abrogé, donc que le principe de l’intégration des DMI au sein des groupes homogènes de séjour (GHS, qui permettent le calcul des tarifs) est acquis, les syndicats de chirurgiens ont remis au gouvernement leurs «solutions» pour sortir de la crise. En rejetant toujours l’accord conclu entre le cabinet de Xavier Bertrand et la Fédération de l’hospitalisation privée (« le Quotidien » du 4 avril).
Le ministère de la Santé a proposé dans cet accord que les cliniques fassent l’avance de frais jusqu’à la fin du mois de juin, en attendant les conclusions d’un groupe de travail collégial (1) sur l’inclusion des DMI – quitte à procéder ensuite à une régularisation des tarifs des GHS « déséquilibrés » grâce à l’application de mesures correctrices. Les chirurgiens suggèrent d’inverser la logique : «C’est à l’assurance-maladie de faire l’avance pour les DMI, ensuite les établissements rembourseront le surplus éventuel», argumente le Dr Caton. Deuxième revendication : les DMI devront être remboursés «à l’euro, l’euro».Mais cela nécessite des études de coûts précises, sans doute longues, pour valoriser les GHS en fonction des interventions chirurgicales pratiquées. L’accord ministère/FHP a prévu un système de compensation moyenne établissement par établissement qui fait craindre «de gros dégâts» aux chirurgiens .
La troisième demande des chirurgiens en colère vise à réparer le manque de concertation sur ce dossier. Ulcérés d’avoir été écartés de décisions qui les concernent( «le syndrome CPE», analyse un manifestant) et s’estimant «mal représentés»... par leurs syndicats représentatifs, le Snco, le Sncv et l’Ucdf souhaitent que chaque spécialité chirurgicale soit entenduedans les discussions. Ils demandent également que le comité chargé d’étudier les mesures correctrices sur les DMI soit «pérennisé» car il n’y a guère de chance que ce dossier trouve une issue dans les trois mois . Une demande que le ministère aurait acceptée.
Certains chirurgiens craignent enfin que l’arrêté incluant les dispositifs médicaux dans les GHS ne soit qu’une étape, le pire restant à venir. «Demain on intégrera les prothèses puis on essaiera de contenir les honoraires, explique Philippe Cuq, président de l’Ucdf. La T2A est un formidable outil de régulation...»
(1) Le groupe de travail implique notamment les syndicats, les sociétés savantes et les fédérations hospitalières. Ses conclusions devront être validées par la Haute Autorité.
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