C' EST la plus flamboyante de leur porte-drapeau. La plus douée de leurs émissaires. A 90 ans, Mireille Jospin n'hésite pas à brandir la bannière des revendications des sages-femmes.
Elle-même ancienne sage-femme en secteur libéral, elle multiplie depuis quelques jours déclarations et entretiens. Elle demande au gouvernement que dirige son fils d'écouter la colère des sages-femmes et de satisfaire leur revendications. Cela peut-il gêner Lionel ? Elle n'en a cure. Même si elle avoue qu'elle n'a pas osé confier à son Premier ministre de fils qu'elle irait manifester dans la rue. Pourtant, elle est bien descendue sur le pavé de la capitale : elle a pris sa voiture, l'a garée à la va-comme-je-te pousse devant le ministère de la Santé - « je suis la mère de Jospin », a-t-elle expliqué aux policiers héberlués - et est allée rejoindre le cortège de ses consœurs en colère. Son dernier accouchement, elle l'a pratiqué voici quatre ans, dans un petit village malien. Dans un entretien avec l'AFP, Mireille Jospin, explique le sens de son combat et revient sur sa carrière.
Pourquoi soutenez-vous la protestation de la profession, qui s'exprime aussi bien dans les hôpitaux, les cliniques privées et les cabinets libéraux ?
Les sages-femmes ont la responsabilité de deux vies entre les mains. Or actuellement elles sont moins bien payées que certaines professions paramédicales, que je ne veux pas abaisser par ailleurs. Mais il y a une responsabilité complète du côté de la sage-femme qu'il n'y a pas chez les paramédicaux. Elles ne se sont jamais mobilisées, mais là elles tiennent le coup, car elles ont des difficultés matérielles qui les obligent à protester.
Je crois que Bernard Kouchner, que j'admire beaucoup, l'a compris.
Voyez-vous des différences au fil des années dans l'exercice de la profession ?
La profession a beaucoup changé. Aujourd'hui, dans les écoles de sages-femmes, la formation est trop mécanique. Il faut redonner plus de liberté aux sages-femmes, qu'elles ne soient pas obligées de travailler tout le temps avec des appareils. On fait trop de césariennes maintenant. Il faut absolument revenir à un suivi plus physiologique, mais avec la sécurité de maintenant. Quand je regarde mon expérience, je vois que je n'ai fait que deux césariennes, et trois ou quatre accouchements au forceps pendant les quinze ans que j'ai passés en libéral. A l'époque, je suivais complètement la femme pendant sa grossesse, je l'accouchais, puis je suivais le bébé un an en consultation gratuitement, mais tout ça a tellement évolué.
Quelles causes soutenez-vous désormais ?
Je suis pour les projets de maisons des naissances (lieux d'accueil sans équipement matériel lourd, où les sages-femmes jouissent d'une grande autonomie, et suivent personnellement chaque femme avant et après l'accouchement,NDLR) . Les maisons de naissance sont répandues aux Pays-Bas, en Suisse, en Belgique, en Allemagne, au Canada, en Grande-Bretagne, mais en France, il n'y en a qu'une, à Sarlat (Dordogne). Sinon, j'ai fait mon dernier accouchement il y a cinq ans, à 86 ans, dans un village malien, où j'ai lancé un programme contre les mutilations sexuelles et les mariages forcés. J'ai envoyé des sages-femmes qui y vont régulièrement.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature