13 - 16 mars 2001 à Paris

Migraines : celles qui constituent une urgence et celles qui nécessitent des explorations

Publié le 19/04/2001
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C'EST ainsi que le Pr Gilles Géraud, président de la Société française d'études des céphalées, a notamment rappelé que le diagnostic différentiel le plus fréquent chez un migraineux connu est la céphalée de tension dont les caractéristiques sont à l'opposé de celles de la migraine (classiquement unilatérale, pulsatile, aggravée à l'effort, d'intensité modérée avec des signes accompagnateurs). La céphalée de tension est caractérisée par une douleur diffuse, bilatérale, non pulsatile, à type de serrement, non aggravée à l'effort, son intensité est légère à modérée et les signes accompagnateurs sont absents. « Si la céphalée de tension est souvent intriquée avec la migraine, la prise en charge de ces deux algies est différente, remarque le Pr G. Géraud. Il est en effet inutile de traiter une céphalée de tension avec un traitement de la crise migraineuse (dérivé de l'ergotamine ou triptan) ; un antidépresseur tricyclique en traitement de fond sera plus volontiers préféré à un bêta-bloquant. »
Un autre piège diagnostique est la céphalée secondaire survenant chez un migraineux connu. Il est indispensable de savoir si cette céphalée est différente des maux de tête habituels, sous peine de passer à côté d'une tumeur, d'un hématome sous-dural... En pratique, toute céphalée qui diffère de ses caractéristiques habituelles doit être considérée comme une céphalée récente et amener le médecin à demander un scanner. En outre, la vigilance s'impose devant une céphalée d'installation brutale, en coup de poignard, alors que, typiquement, la migraine s'installe progressivement en une dizaine de minutes.
La céphalée transformée concerne près de la moitié des patients consultant dans les centres de migraine. Souvent mal connue des médecins et des patients, cette céphalée est chronique, quotidienne, liée huit fois sur dix à un abus d'antalgiques. Le sevrage médicamenteux paraît être la seule solution pour rompre ce cercle vicieux, le plus souvent effectué en milieu hospitalier, en association avec un traitement de fond préventif.
Un autre cas de figure concerne la céphalée d'origine cervicale, c'est-à-dire des douleurs au niveau de la région occipitale et de la nuque, présent chez deux tiers des migraineux, qui seraient expliquées par l'existence d'anastomoses entre le trijumeau et les trois premières racines cervicales.

Modes d'installation évocateurs

Quelques règles simples d'orientation diagnostique méritent d'être connues parmi les nombreuses situations cliniques : elles concernent les modes d'installation de la céphalée présentées par les Drs Christian Lucas et Michel Lanteri-Minet à l'aide d'un outil interactif de formation des MG :
- une céphalée ictale, en « coup de tonnerre », doit faire suspecter une organicité et évoquer en premier lieu une hémorragie cérébro-méningée, en deuxième lieu une thrombophlébite cérébrale et plus rarement une dissection artérielle cervicale. L'hospitalisation s'impose en vue d'un scanner ;
- la survenue chez un migraineux connu d'une céphalée aiguë inhabituelle ou d'une céphalée chronique d'installation récente doit amener à refaire un examen neurologique avec, au moindre doute, un scanner pour éliminer toutes les causes importantes d'hypertension intracrânienne ;
- une céphalée d'apparition récente chez un sujet de 40-50 ans doit imposer un bilan
(scanner, VS) ;
- l'association d'un élément migraineux et d'un élément dysthymique ne doit pas faire étiqueter trop vite le patient comme étant fonctionnel ;
- une céphalée en coup de pic à glace est considérée comme bénigne si elle survient en des endroits différents. En revanche, une malformation vasculaire, notamment artério-veineuse, doit être suspectée si la céphalée survient toujours au même endroit ;
- un autre problème concerne les céphalées coïtales qui peuvent être de deux types : soit premier épisode de céphalée progressivement croissante, plutôt occipitale (type 1) équivalent d'une céphalée musculaire à type de contracture ; soit premier épisode explosif (type 2), avec une céphalée en coup de tonnerre, dont la douleur atroce est maximale lors de l'orgasme. Cette céphalée coïtale explosive doit faire penser à une éventuelle rupture d'anévrysme et recourir à une hospitalisation en urgence pour exploration ;
- en ce qui concerne les dissections artérielles cervicales, les premiers signes sont des cervicalgies inhabituelles, le plus souvent entre 42 et 46 ans. Par conséquent, la survenue de cervicalgies ou de céphalées inhabituelles après un effort physique, surtout si elles sont accompagnées d'acouphènes, imposent la pratique d'un écho-Doppler cervical.

* Atelier Interactif sur les migraines parrainé par les Laboratoires AstraZeneca, avec le Pr G. Géraud, hôpital Rangueil (Toulouse), et les Drs C. Lucas (CHU Lille) et M. Lanteri-Minet (CHU Nice).

Dr Martine ANDRE

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6902