L' AGREGATION familiale des cas de migraine et les études de jumeaux indiquent l'existence d'une composante génétique dans l'affection. Pour autant, aucun gène n'a pu être mis en cause. Dans la migraine hémiplégique familiale, une forme rare à transmission autosomique dominante, trois locus ont été désignés. Mais dans les formes communes, les recherches menées, entre autres, sur le récepteur D2 de la dopamine, le cytochrome P450 2D6, la glutathion transférase et la NO-synthétase 3, n'ont abouti qu'à des résultats contradictoires (récepteur D2) ou négatifs.
Un vasoconstricteur puissant
Une équipe comportant des chercheurs des unités INSERM 360 et 525 et du service de neurologie de l'hôpital Lariboisière (Paris) s'est intéressée au récepteur ETA de l'endothéline. On sait que l'endothéline est un vasoconstricteur puissant. Son rôle peut donc a priori être soupçonné. Des taux élevés d'endothéline ont d'ailleurs été rapportés chez les migraineux, lors des crises, et entre les crises. Quant aux récepteurs, on en connaît deux types : ETA et ETB, le premier étant impliqué directement dans la vasoconstriction, le second dans une vasodilatation transitoire qui précède la constriction.
C'est dans le gène codant le récepteur ETA qu'un polymorphisme associé à la migraine a été mis en évidence. On distingue deux allèles du gène, l'un portant une guanine, l'autre une adénine en position en position 231. Apparemment, l'allèle A majore le risque.
L'étude a porté sur 1 188 personnes âgées, résidant à Nantes. Leurs antécédents de migraine ont été recherchés par un spécialiste et différents polymorphismes ont été analysés dans les gènes codant l'endothéline et ses récepteurs ETA et ETB. Seul le polymorphisme ETA-231 A/G s'est montré significativement associé à la migraine. Alors que les fréquences des allèles A et G étaient similaires à ce qui avait déjà été rapporté dans la population française (0,68 et 0,32), un excès d'allèle a été retrouvé parmi les 140 migraineux identifiés dans l'étude. Chez les sujets de génotype AA, la prévalence de la migraine était de 15,7 % contre 9,7 % chez les sujets AG, et 2,9 % chez les homozygotes GG. On note, par ailleurs, que l'association, retrouvée dans les deux sexes, était plus étroite chez les hommes, ainsi que chez les migraineux rapportant des antécédents familiaux. Enfin, la tendance générale est retrouvée pour les migraines avec aura, sans toutefois atteindre le seuil de significativité, l'effectif concerné (27 personnes) étant trop réduit.
Sous réserve de confirmation, l'association observée entre polymorphisme du gène ETA et migraine pourrait permettre d'approfondir la physiopathologie de l'affection. Une difficulté, cependant : le polymorphisme 231 A/G est situé dans une région non exprimée du gène ; autrement dit, les récepteurs codés par l'un ou l'autre allèle sont identiques. On peut imaginer que le polymorphisme module le niveau d'expression du gène et, par conséquent, le taux de récepteurs ETA.
Associé à une autre mutation
On peut également envisager que ce polymorphisme est un simple marqueur, associé à une autre mutation, traduite, elle, au niveau phénotypique et située à proximité, dans le gène ETA, ou à plus grande distance, en cas de déséquilibre de liaison.
Pour entrer dans la physiopathologie de l'affection, il faudra, dans un premier temps, comprendre quelles sont, au niveau des récepteurs, les conséquences directes de ce polymorphisme, ou d'un autre polymorphisme associé, qui reste à identifier.
C. Tzourio et coll. « Neurology », 2001 ; 56 : 1273-1277.
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