Les migraineux chroniques (2,4 % de la population des pays industrialisés) représentent la grande majorité des consultants des services spécialisés. Cette pathologie débute généralement au cours de l'adolescence et la fréquence des épisodes douloureux augmente avec l'âge, alors que celle des signes accompagnateurs (nausées, vomissements, photo-phono-phobie) s'abaisse progressivement.
Plus de quinze jours par mois
Nosologiquement, on considère que les migraines deviennent chroniques lorsqu'elles atteignent le sujet plus de quinze jours par mois. Cette pathologie complexe s'associe souvent à d'autres caractéristiques cliniques : abus médicamenteux, anxiété généralisée (70 %), symptomatologie dépressive majeure (80 %) et insomnie (71 %).
Les causes exactes du développement de cette symptomatologie et les mécanismes qui la sous-tendent sont encore mal connus. Diverses pistes ont été proposées : inflammation neurogène chronique, sensibilisation centrale, anomalies de la modulation des douleurs centrales, dysfonction hypothalamique, voire combinaison de l'ensemble de ces facteurs.
Le rôle de l'hypothalamus chez les patients atteints de céphalées de Horton est bien connu. L'équipe du Dr Perez (Sao Paulo, Brésil) a exploré le système hypothalamo-tubéro-infundibulaire (prolactine, hormone de croissance), l'axe hypothalamo-hypophyso-adrénergique (cortisol) et la fonction pinéale (mélatonine) de sujets atteints de migraine chronique, accompagnée ou non d'insomnie.
L'étude a été mise en place de février à avril 1999, période durant laquelle 338 échantillons sanguins (soit 13 par patient) ont été prélevés chez 17 sujets souffrant de migraine chronique (14 femmes et 3 hommes âgés en moyenne de 31 ans, dont 11 sujets en abus d'analgésiques) et comparés avec ceux de sujets témoins appariés pour l'âge et le sexe. Des prélèvements pour des dosages de mélatonine, de prolactine, d'hormone de croissance et de cortisol ont été effectués toutes les heures pendant au moins douze heures.
Près de la moitié des sujets souffrant de migraine chronique (47 %) présentaient un retard du pic de mélatonine, contre aucun des sujets du groupe contrôle. Globalement, aucune différence significative entre la sécrétion nocturne totale de mélatonine n'a été notée entre les malades et les témoins. Néanmoins, chez les 8 sujets souffrant à la fois de migraine chronique et d'insomnie, les pics de concentration, les aires sous la courbe et la concentration moyenne de mélatonine étaient inférieurs aux valeurs retrouvées chez les migraineux non insomniaques et chez les sujets contrôles. Si les auteurs reconnaissent qu'il est impossible de se prononcer sur l'origine du décalage de pic de mélatonine (cause ou conséquence de la migraine), ils estiment néanmoins qu'un traitement hormonal (5 mg de mélatonine au coucher) devrait être testé chez les sujets souffrant à la fois de migraine chronique et d'insomnie. La mélatonine, dont l'action éliminatrice de radicaux libres est déjà connue, pourrait contribuer à limiter les phénomènes d'inflammation du système nerveux central chez ces patients.
Prolactine : un lien avec la dopamine
En outre, les concentrations sériques de prolactine des migraineux étaient inférieures à 25 ng/ml chez 53 % des migraineux et chez 2 des 9 sujets contrôles. Ces valeurs n'étaient pas influencées par la consommation d'analgésiques, les signes dépressifs et l'insomnie. Pour le Dr Perez, « la baisse des taux de prolactine pourrait être liée à une majoration de la sécrétion de dopamine, un inhibiteur de la prolactine produit en excès chez certains migraineux chroniques ».
Les concentrations de cortisol des sujets migraineux et la valeur de leur pic de sécrétion se sont révélées, en moyenne, plus élevées que celles des sujets témoins, sans que des facteurs telles l'existence d'une insomnie ou la consommation d'antalgique influent sur le résultat. Cette augmentation pourrait s'expliquer par l'induction d'une sécrétion de glucocorticoïdes dans certaines circonstances cliniques, telles que l'inflammation ou la dysimmunité. Enfin, aucune différence significative de concentration sérique en hormone de croissance n'a été notée entre les deux groupes.
« J Neurol Neurosurg Psychiatry », 2001 ;71 : 747-751.
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