« Je suis atteinte de l'ataxie de Friedreich, identifiée à l'âge de 12 ans ; aujourd'hui, j'en ai 20. Jusqu'à présent, je n'ai suivi aucune kinésithérapie correspondant à ma maladie ; les médecins et les kinés ne connaissent pas l'ataxie de Friedreich ; de plus, il est aussi difficile de trouver un neurologue qui connaisse, et je ne suis suivie par personne ! Comment résoudre ce problème ? A qui pourrais-je m'adresser ? Pouvez-vous m'aider ? Merci si vous pouviez me répondre et pour votre attention ! ».
Des appels comme celui-là, l'AFAF (Association française de l'ataxie de Friedreich) en reçoit régulièrement. Sa présidente, le Dr Juliette Dieusaert, dont le fils, âgé aujourd'hui de 25 ans, est lui aussi atteint, l'affirme : « Nous avons de plus en plus de mal à supporter qu'en 2003 des soignants ne sachent pas où s'informer ; d'autres ne cherchent pas non plus à s'informer !»
Après un parcours médical compliqué, une fois le diagnostic posé, les malades se retrouvent souvent seuls dans une situation où il ne leur est proposé aucun accompagnement, « pas même un accompagnement psychologique ». Et, poursuit le Dr Juliette Dieusaert, « ces patients sont souvent des ados qui savent qu'ils sont atteints d'une maladie génétique grave, incurable, et qui va progressivement les priver de leur autonomie ».
Une lettre à tous les neurologues
Pour les 600 adhérents de l'AFAF, il devenait urgent d'informer sur les avancées de la recherche au cours de ces quatre dernières années, pour que la prise en charge ne s'arrête pas à la simple visite annuelle au spécialiste. « Il nous a semblé que c'était à nous de le faire. Nous avons donc pris l'initiative d'une lettre adressée aux 2 155 neurologues de France, dans laquelle les différentes équipes impliquées dans la recherche font le point sur la maladie », explique Juliette Dieusaert.
La lettre, signée par le Pr Alexis Brice et le Dr Alexandra Dürr, de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris), et par Agnès Rötig et Pierre Rustin, tous deux directeurs de recherche à l'hôpital Necker-Enfants malades, rappelle que le gène responsable de l'ataxie de Friedreich a été identifié il y a huit ans. « A la suite de cette découverte, de nombreuses équipes de recherche se sont attachées à comprendre le mécanisme de cette maladie. » Le gène, localisé sur le chromosome 9, code pour une protéine, la frataxine. « Il a été démontré que la maladie a pour origine la quasi-absence de cette protéine. Les conséquences sont une perturbation de la synthèse d'une famille de protéines - les protéines fer-soufre de la mitochondrie, une altération des défenses antioxydantes cellulaires sont perturbées et une accumulation anormale de fer dans les mitochondries. »
Un diagnostic de certitude
Ces études ont aussi conduit à la mise au point d'un test qui rend maintenant possible le diagnostic de certitude de la maladie. De même, est aujourd'hui proposé aux familles un diagnostic prénatal. L'étude moléculaire de l'ADN met, en effet, en évidence l'expansion du triplet GAA situé dans l'intron 1 du gène qui est caractéristique de la maladie.
Chez la souris transgénique, chez qui le gène équivalent a été totalement inactivé, les chercheurs ont pu reproduire les atteintes des cellules nerveuses et cardiaques qui sont deux anomalies majeures observées au cours de la maladie et qui rendent compte des deux atteintes les plus fréquentes : l'ataxie et la cardiomyopathie hypertrophique. Ces travaux ont permis de montrer que la coenzyme Q10 ou ses dérivées (idébénone) améliorent les anomalies de la chaîne respiratoire mitochondriale. Les études cliniques de l'idébénone qui ont, à ce jour, été vérifiées « sont essentiellement restreintes à l'aspect cardiaque de la maladie ». Car, même s'il est trop tôt pour se prononcer sur un éventuel effet sur les signes neurologiques (certains malades signalent cependant l'amélioration de l'asthénie, de la dysarthrie et un meilleur contrôle des mouvements fins), il n'a pas été observé d'effet spectaculaire sur l'ataxie. Et on sait qu'elle n'empêche ni l'apparition, ni l'aggravation de la maladie, bien qu'elle puisse peut-être en ralentir l'évolution.
Cependant, les auteurs font observer que si l'ataxie de Friedreich est pour l'essentiel une maladie neurologique, l'atteinte cardiaque est souvent déterminante dans le pronostic évolutif. Par ailleurs, l'idébénone (Mnésis) ne présentant aucune toxicité connue, son administration reste sans danger et doit « constituer désormais un élément majeur dans la lutte contre cette maladie ». Le traitement qui a récemment été reconnu « médicament orphelin » en Europe, peut être obtenu grâce une ATU nominative. Il est prescrit à la dose de 5 à 7,5 mg/kg/jour.
Maladie autosomique récessive, l'ataxie de Friedreich est la plus fréquente des ataxies héréditaires. Elle se manifeste en moyenne vers l'âge de 15 ans. Cliniquement, les premiers signes à apparaître sont les troubles de la marche, avec pied creux bilatéral, et la dysarthrie. L'association d'une ataxie progressive et d'une dysarthrie survenant chez un sujet jeune est évocatrice. La maladie évolue progressivement vers une perte de la marche, environ quinze ans après l'apparition des premiers symptômes. Les complications sont surtout cardio-pulmonaires.
L'accent doit être mis sur les traitements symptomatiques et la prise en charge par kinésithérapie, orthophonie et ergothérapie. L'incidence de la maladie est de 2,5/100 00, soit environ 1 500 personnes non recensées, car la maladie reste encore sous-diagnostiquée.
Sites à consulter : www.http://orphanet.infobiogen.fr/associations/AFAF/ et www.ataxie.com. Tél./fax de l'AFAF 03.23.58.61.65.
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