Les implants cochléaires

Mieux comprendre les indications

Publié le 19/11/2008
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PAR LE Pr BERNARD MEYER *

L'IMPLANT COCHLÉAIRE (IC) est une cochlée électronique simplifiée qui stimule le nerf cochléaire et s'oppose donc aux classiques aides auditives externes ou aux aides auditives semi-implantables (ou même totalement implantables proposées récemment), appelées implants d'oreille moyenne (IOM). Son résultat dépendra de la qualité fonctionnelle des voies nerveuses et des capacités cérébrales les plus subtiles, lesquelles sont difficiles à apprécier et restent très imprécises.

Les aides auditives modifient le signal acoustique qui devra finalement être traité par la cochlée naturelle. C'est de la qualité d'analyse de celle-ci que dépendra finalement le résultat auditif. Aussi parfaits que soient le travail de l'aide auditive et la qualité de la transmission, on comprend donc les limites de l'aide auditive lorsque la cochlée est très déficiente.

L'indication de l'implant cochléaire se situe aujourd'hui dans la continuité de celle des aides auditives, jusqu'à, et y compris, la cophose. C'est l'insuffisance d'une aide auditive qui justifie de proposer un implant cochléaire. Toutefois, il est nécessaire que l'atteinte auditive soit bilatérale et que le meilleur côté soit insuffisamment amélioré par l'aide auditive. La question est de savoir si l'amélioration de la qualité de vie apportée par les aides auditives est suffisante ou non, et de prévoir ce qu'elle serait avec un IC. Il faut inciter les patients à consulter leur audioprothésiste pour essayer les nouvelles générations d'aides auditives. On peut, en effet, être surpris de la qualité de l'amélioration de certaines déficiences auditives apportée par un appareillage externe bien choisi et bien réglé.

Le problème s'est compliqué depuis dix ans avec l'apparition des IOM, qui sont censés pouvoir aider les surdités de perception au-delà de ce que peuvent faire les aides auditives traditionnelles. Le problème est qu'il est impossible de faire un essai dans les conditions réelles tant que l'IOM n'est pas en place, ce qui nécessite un geste chirurgical complexe. De plus, beaucoup de surdités cochléaires bilatérales importantes sont évolutives et l'indication de l'IOM n'est pas très éloignée de celle de l'IC.

En pratique, chez un adulte, c'est l'audiométrie vocale avec aide auditive en place qui permet de poser finalement l'indication de l'IC. Un patient dont l'intelligibilité ne dépasse pas 50 % à 65 dB sera certainement davantage aidé par un IC. Toutefois, on se heurte, comme toujours lors des surdités cochléaires, à la difficulté de compréhension dans le bruit. Avec un score meilleur que la limite proposée pour un IC, certains patients sont si gênés qu'on leur proposera un IC.

Chez un adulte devenu sourd progressivement, ayant donc développé peu à peu des capacités lui permettant de comprendre avec des informations sonores restreintes et se servant de plus en plus de la lecture labiale, un IC peut donner des résultats surprenants, avec une compréhension immédiate de la parole, même au téléphone. Si certains arrivent à ce résultat, d'autres, en revanche, n'ont pas les mêmes capacités. Le résultat peut être lentement progressif et même décevant à long terme. Cette différence se situe probablement dans les capacités du système nerveux, l'oreille ne jouant aucun rôle dans ces cas. Cet échec relatif est prévisible chez un adulte sourd depuis l'enfance, mais avec des restes auditifs ayant permis l'acquisition du langage. Un adulte sourd complet depuis la petite enfance ne doit pas être implanté. Ce serait un échec.

Le pronostic est difficile à établir.

Le pronostic fonctionnel est donc difficile à établir. On peut cependant constater que les privations sensorielles très anciennes, de l'ordre de deux ou trois décennies, provoqueront un échec thérapeutique par dégénérescence fonctionnelle des voies auditives. De même, les malformations, les ossifications partielles (par méningite, labyrinthites, fracture), les maladies de Ménière et les otospongioses peuvent donner des résultats moins bons pour des raisons de stimulations électriques plus complexes. Enfin, l'ossification totale ou la destruction des deux nerfs cochléaires (NF2 opérées) justifient les implants auditifs du tronc cérébral, dont les résultats encourageants ne sont pas ceux de l'IC proprement dit.

Chez l'enfant, le résultat est immédiat sur son comportement. L'encadrement doit être rigoureux, les parents, les orthophonistes et les éducateurs avertis jouant un rôle essentiel dans la qualité du développement du langage de l'enfant.

* Hôpital Saint-Antoine et hôpital Beaujon, Paris.

Résultats chez l'enfant

Chez l'enfant sourd nécessitant un IC, le plus tôt est le mieux. Le cerveau de l'enfant s'accommode bien de la restriction auditive de l'IC. Si la surdité est progressive, il faut choisir le bon moment et ne pas laisser traîner l'enfant avec une aide auditive insuffisante. Si la surdité justifie d'emblée un IC, il est aujourd'hui prouvé que le plus tôt est le mieux, l'âge de 1 an n'étant pas trop tard pour l'enfant et suffisamment éloigné du choc du diagnostic pour que les parents aient fait le deuil de l'audition de l'enfant. Autour de 1 an, les résultats sont surprenants, la scolarisation ne posant pratiquement pas de difficultés.

MEYER Bernard

Source : lequotidiendumedecin.fr