LE DÉPIT CONDUIT PARFOIS à des rapprochements insolites. Après avoir malmené publiquement le Dr Michel Chassang, son chef de file au sein de la Confédération des syndicats médicaux français (Csmf) - au motif qu'il ne défend pas assez les intérêts des médecins spécialistes libéraux (« le Quotidien » du 13 février) - le président de l'Umespe, la branche spécialiste de la Csmf, se tourne maintenant vers MG-France, un syndicat de généralistes que les médecins confédérés ne peuvent souvent voir qu'en peinture. Interrogé par « le Quotidien », le Dr Jean-François Rey reconnaît en effet « avoir échangé » il y a une semaine avec le Dr Pierre Costes, leader de MG-France. Le président de l'Umespe relativise aussitôt cette rencontre en face à face lors d'un dîner à Paris, au sujet duquel le Dr Costes, lui, ne veut rien dire. Jean-François Rey rappelle que l'Union collégiale des chirurgiens et spécialistes de France (Uccsf) « reste l'alliée naturelle » de l'Umespe, même s'il lui est arrivé d' « échanger aussi avec Martial Olivier-Koerhet [premier vice-président de MG-France, Ndlr] dans le cadre du comité de pilotage de la CCAM » (future classification commune des actes médicaux). Surtout, le Dr Rey souligne que ce dîner discret s'inscrit dans le cadre des « nombreuses discussions » tous azimuts qui ont lieu actuellement en vue de la réforme de l'assurance-maladie. Quand les dirigeants de la Csmf se rendent « au Medef pour voir Guillaume Sarkozy » (en charge de la protection sociale au patronat) ou à la Mutualité Française (qui vient de signer une déclaration commune avec la Csmf), il s'agit, explique-t-il, de « rencontres utiles et importantes mais rien n'est définitif ».
Ce récent contact entre les présidents de MG-France et de l'Umespe était-il purement formel ? Pas vraiment. Certes, une réouverture de négociations conventionnelles pour les généralistes et les spécialistes n'est pas à l'ordre du jour, du moins pas avant l'automne (le réglement conventionnel minimal ou RCM arrivant à échéance le 31 décembre 2004). La dernière tentative du Syndicat des médecins libéraux (SML) pour obtenir une convention provisoire à l'intention des seuls spécialistes a été accueillie par une fin de non-recevoir par les caisses le 26 novembre dernier. Le président de l'Umespe ne veut pas tenter l'aventure à son tour, alors que les caisses n'ont rien de plus à proposer qu'auparavant.
Vers un consensus sur la permanence des soins.
En revanche, le Dr Costes et le Dr Rey commencent, semble-t-il, à se trouver des intérêts convergents depuis que MG-France, puis l'Umespe et l'Uccsf, ont réclamé aux pouvoirs publics des moyens pour assurer la permanence des soins. « Pierre Costes a des problèmes en ce qui concerne la permanence des soins, moi aussi. Mais le règlement de ce problème pour les médecins de famille et les spécialistes ne se fera sans doute pas de la même manière », précise le Dr Rey. Autant la rémunération des gardes, astreintes et régulations des généralistes nécessite une impulsion de la Caisse nationale d'assurance-maladie (Cnam), autant les spécialistes peuvent miser éventuellement sur un supplément de rémunération via la tarification à l'activité (T2A), à condition, insiste le Dr Rey, qu'il leur soit versé « directement et non par l'intermédiaire des cliniques ».
Le président de MG-France trouve « logique d'ouvrir le chantier de la permanence des soins dès aujourd'hui », même si des groupes de travail commencent aujourd'hui même au ministère dans le cadre de la concertation sur la réforme. Le Dr Costes exige en effet des mesures applicables « dès le mois de juin 2004 » et non à l'horizon 2005. Ça tombe bien, le Dr Rey pense aussi qu'il y a urgence en la matière : « Les anesthésistes-réanimateurs ne peuvent pas attendre la réforme l'année prochaine. »
Par ailleurs, Pierre Costes considère le dossier de la permanence des soins comme « une porte d'entrée », susceptible d'ouvrir des discussions avec les spécialistes sur la notion de « territorialité » et sur la coordination des soins. Problème : l'option médecin référent, défendue par MG-France, a créé « un fossé entre MG et nous », rappelle le leader de l'Umespe. Et pourtant, nuance le Dr Rey, « l'année dernière, lors des négociations conventionnelles, on n'était pas loin d'aboutir à un accord sur la coordination des soins [visant à majorer les actes des spécialistes en accès indirect, Ndlr] : ce n'est pas MG-France qui avait bloqué, mais les caisses ». Comme quoi, tout est encore possible.
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