En cas de suspicion de méningite chez l'adulte, il est habituel de réaliser un scanner cérébral avant la ponction lombaire. Les résultats de Rodrigo Hasbun et coll.* confortent l'idée d'une approche différente, simplifiée, de ces patients, en ne réalisant le scanner avant la ponction lombaire qu'en présence d'au moins un des traits cliniques qu'ils ont identifiés.
La PL est indispensable au diagnostic de méningite, mais ce geste peut déclencher un engagement cérébral, événement grave dont on connaît l'issue souvent fatale. En présence d'une lésion inflammatoire volumineuse (empyème sous-dural, abcès cérébral, toxoplasmose cérébrale), d'une lésion tumorale ou hémorragique, surtout lorsqu'il y a une expansion rapide, l'augmentation du gradient de pression due à la PL peut déplacer brutalement vers le bas le cerveau et le tronc cérébral qui s'engagent en hernie de façon catastrophique dans le trou occipital.
Augmentation de la pression intracrânienne
Cela est aussi parfois susceptible de se produire lors d'une PL chez des patients ayant une méningite bactérienne ou fongique (à cause de l'dème cérébral, d'une thrombose du sinus sagittal ou de la veine corticale, de l'occlusion inflammatoire du villus arachnoïde).
Une augmentation de la pression intracrânienne existe presque toujours dans les méningites purulentes.
En cas de suspicion de méningite, comment identifier les rares cas où la PL est contre-indiquée ? Le scanner est utile pour détecter les lésions intracrâniennes faisant masse et occupant de l'espace (suggérant un autre diagnostic que la méningite), mais il ne peut déterminer les augmentations de pression ou prédire le risque d'engagement en cas de méningite.
Le travail signé par Hasbun et coll. apporte de nouvelles informations. Entre 1995 et 1999, 301 adultes (âgés de plus de 16 ans), suspectés de méningite, ont été évalués de manière prospective dans un service d'urgences.
Un scanner a été réalisé chez 235 d'entre eux (78 %) avant la PL, avec une double lecture par deux radiologues.
Deux questions ou deux ordres
Des traits cliniques associés à une probabilité élevée d'anomalies au scanner se sont dégagés : un âge supérieur à 60 ans, une immunosuppression (en tant que résultat d'une encéphalite toxoplasmique ou d'un lymphome du SNC), des antécédents de lésions du SNC, des antécédents de convulsions focales ou généralisées pendant la semaine précédente, l'incapacité à répondre correctement à deux questions successives ou d'obéir à deux ordres, une paralysie oculaire (pupilles peu ou réactives), un dème papillaire, des anomalies des champs visuels, une hémiparésie et des anomalies du langage (aphasie). A cela s'ajoutent des signes d'atteinte du système nerveux autonome (une bradycardie, une irrégularité respiratoire) et une posture de décérébration ou de décortication.
Parmi les 235 personnes ayant eu un scanner, 96 ne présentaient aucun de ces signes. Elles ont été considérées comme à faible risque d'anomalies au scanner cérébral. De fait, seulement trois personnes de ce groupe avaient un scanner anormal. La PL n'a pas eu chez elles de conséquences dommageables.
Quatre autres patients avaient des signes au scanner contre-indiquant la PL (effet de masse). La valeur prédictive négative du scanner est de 97 %.
« Cette étude donne des critères cliniques utilisables pour identifier des patients à haute probabilité d'un scanner normal et qui sont donc de bons candidats à la PL », écrit Neal Steigbigel (New York) en commentaire. Elle suggère également que le scanner est trop largement utilisé, car seulement une très faible proportion des patients chez qui une méningite est suspectée a eu un effet de masse ou des résultats indiquant la présence d'une augmentation de la pression du LCR.
Un scanner normal ne permet toutefois pas d'écarter l'éventualité d'un engagement cérébral provoqué par la méningite elle-même.
* « New England Journal of Medicine », vol. 345, n° 24, 13 décembre 2001, pp. 1727-1732 et commentaire pp. 1768-1770.
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