Les tumeurs embryonnaires du système nerveux central représentent un groupe hétérogène, sur lequel peu de choses sont connues du point de vue biologique. Leur diagnostic, se fondant uniquement sur la morphologie, est sujet à controverses. Scott L. Pomeroy et de nombreux autres chercheurs américains publient dans « Nature » leurs travaux concernant les médulloblastomes, tumeurs cérébrales les plus fréquentes chez l'enfant. Leur pathogenèse est inconnue, leurs relations avec les autres tumeurs embryonnaires du système nerveux central sont sujettes à débat et, enfin, la réponse thérapeutique est difficile à prévoir.
Il faut se souvenir que deux hypothèses existent en ce qui concerne la classification des médulloblastomes : la première les considère comme faisant partie d'une classe plus large de tumeurs neuroectodermiques primitives, issues d'un type cellulaire commun provenant de la matrice germinale subventriculaire ; l'autre, qu'ils proviennent de progéniteurs des cellules granuleuses cérébelleuses.
Le microarrangement des gènes
Les auteurs ont utilisé une méthode de classification fondée sur le microarrangement des gènes, chez quatre-vingt-dix-neuf patients. Dans un premier temps, ils ont pu montrer que les médulloblastomes sont moléculairement distincts d'autres tumeurs cérébrales, telles que les neuroectodermiques primitives, tératoïdes-rhabdoïdes atypiques et les gliomes malins. Ils ont ensuite mis en évidence que les médulloblastomes sont issus, à l'inverse des tumeurs neuroectodermiques primitives, soit des cellules granuleuses cérébelleuses, soit qu'ils ont activé le programme de transcription de ces cellules cérébelleuses.
Les auteurs ont ensuite focalisé leurs travaux sur l'hétérogénéité moléculaire des médulloblastomes. Leur principale sous-classe histologique, la forme desmoplastique, est de diagnostic éminemment subjectif. Ils ont pu mettre en évidence une expression génique différente entre cette forme la plus fréquente et le médulloblastome classique. La signature génétique est statistiquement significative au point d'avoir permis d'en identifier 33 sur une série de 34 patients.
Gènes de la différenciation cérébelleuse
Le dernier défi pour les médecins a été de tenter de prévoir la réponse thérapeutique des médulloblastomes. Alors que certains patients sont traités par la radiochimiothérapie, d'autres continuent de voir leur maladie progresser. Le seul élément pronostique actuel est le grade de la tumeur, fondé sur la taille peropératoire, et la présence de métastases, avec bien des erreurs d'évaluation. Les chercheurs ont pu démontrer que l'analyse de l'expression de gènes se révèle de bien meilleur pronostic que les méthodes classiques. Un certain nombre de gènes jusqu'alors non associés à l'évolution clinique ont été identifiés. Ceux témoins d'une évolution favorable incluent de nombreux gènes caractéristiques de la différenciation cérébelleuse (ß-NAP, NSCL1, TRKC, canaux sodium) et ceux codant pour les protéines de la matrice extracellulaire (lysyl hydroxylase PLOD, collagène de type V alpha 1, élastine). Le gène TRKC (récepteur de la neurotrophine 3) était d'ailleurs déjà suspecté comme de bon pronostic. Une évolution péjorative est associée à une expression élevée des gènes corrélés au métabolisme et à la prolifération cellulaires (MYBL2, enolase1, LDH, HMG1, cytochrome C oxydase), à la multirésistance aux drogues et aux gènes codant pour les protéines ribosomales.
Bien sûr, les auteurs reconnaissent le caractère novateur de leur travail qui devra être confirmé par de nouvelles données. Mais leur étude illustre le potentiel des technologies de la génomique dans les avancées thérapeutiques grâce à une approche individuelle moléculairement définie.
« Nature », vol. 415, 24 janvier 2002, pp 436-442.
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