Le médulloblastome est en fréquence la deuxième tumeur cérébrale chez l'enfant (après les astrocytomes), constituant 20 % de la totalité des tumeurs cérébrales pédiatriques.
L'étiologie et la pathogénie des médulloblastomes restent mystérieuses. Certains facteurs de risque ont été associés, tels qu'une irradiation, des syndromes génétiquement transmis (neurofibromatose, syndrome de Turcot ou de Gorlin).
Luis Del Valle et Kamel Khalili (National Cancer Institute, Philadelphie) sont partis d'un certain nombre d'arguments faisant supposer une association entre le médulloblastome et l'infection par le virus JC (virus de la leucoencéphalopathie multifocale progressive).
La leucoencéphalopathie focale progressive
Le virus JC est un rétrovirus humain, membre de la famille des papovavirus, proche du virus du polyome, mais qui n'a jamais été trouvé en association avec un cancer humain. En revanche, il fait parler de lui en raison de son rôle établi dans un syndrome démyélinisant fatal, la leucoencéphalopathie focale progressive, qui est fréquemment associée au SIDA.
Les auteurs américains ont recherché la présence de séquences spécifiques du génome du virus JC, sous la forme de l'antigène T (une protéine qui est codée par le génome viral des papovavirus aux phases précoces de sa réplication, et dont on soupçonne l'implication dans différentes tumeurs cérébrales) et de l'agnoprotéine, une protéine spécifique du virus JC.
Ils ont décelé la présence du gène codant l'agnoprotéine dans 69 % des 16 médulloblastomes testés, et l'ADN de l'antigène T chez 45 % des 20 patients porteurs de la tumeur. Chez deux patients, on n'a trouvé que l'agnoprotéine. Cette mise en évidence de l'expression de l'agnoprotéine en l'absence de celle de l'antigène T fait supposer aux auteurs un rôle potentiel de l'agnoprotéine dans le développement des médulloblastomes associés au virus JC.
L'antigène T peut être cause de tumeurs cérébrales par blocage des protéines suppresseurs de tumeur, telles que p53 et pRb. En revanche, le rôle de l'agnoprotéine demeure inconnu.
Des travaux récents suggèrent cependant que l'interaction de l'antigène T avec l'agnoprotéine peut promouvoir l'aptitude de l'antigène T à induire la réplication des gènes viraux.
Un virus le plus souvent latent
Quoi qu'il en soit, la compréhension des mécanismes pathogéniques moléculaires peut permettre de mettre en évidence de nouvelles cibles thérapeutiques. Il faudrait néanmoins que le mécanisme soupçonné soit confirmé.
Le virus JC est présent chez 70 % des individus à l'échelle mondiale, l'infection se contractant pendant l'enfance (65 % de la population est infectée à l'âge de 14 ans), très probablement par voie respiratoire de parent à enfant. Le virus reste latent pendant le reste de l'existence le plus souvent. Parfois, il occasionne des désordres peu graves. C'est un défaut immunitaire qui conduit dans certains cas le virus à devenir plus agressif.
Les raisons pour lesquelles le virus JC entre dans le cerveau sont peu claires. Le rôle des lymphocytes B est en discussion.
Les chercheurs vont maintenant s'efforcer de savoir si le virus est la cause de médulloblastomes, si la tumeur se développe à cause d'un autre élément, le virus agissant comme cofacteur, ou bien encore si la tumeur existe pour une tout autre raison, la présence du virus JC étant purement fortuite.
Dans un éditorial associé, Howard Fine (National Cancer Institute) évoque cette dernière hypothèse. Pour lui, il est possible que la présence des séquences protéiques dans les cellules tumorales reflète simplement un vestige génétique d'une infection antérieure avortée qui est survenue au niveau d'un progéniteur cellulaire qui s'est par la suite transformé en cellule tumorale.
« Journal of the National Cancer Institute », vol. 94, n° 4, 20 février 2002, pp. 267-273.
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