Le déficit du régime général et la préparation du PLFSS 2003

Médicaments : mise en place de forfaits de prise en charge et déremboursements

Publié le 25/09/2002
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« Une politique du médicament moderne et équilibrée » : en présentant les mesures qui concerneront ce secteur dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2003, Jean-François Mattei s'est voulu à la fois déterminé à réduire les dépenses de médicaments à la charge de la Sécurité sociale et rassurant pour les industriels, légitimement inquiets après les diverses mesures de baisses de prix et de taux de remboursement appliquées au cours des dernières années, notamment par Elisabeth Guigou.

L'arrivée de molécules de plus en plus innovantes, l'extension de la durée de traitement pour certaines maladies et le vieillissement général expliquent certes cette forte poussée des dépenses, a précisé le ministre de la Santé en présentant les grandes lignes de son projet de loi, et « il est donc légitime que l'assurance-maladie soit de plus en plus soucieuse encore de l'argent des cotisants ». Comprenez, qu'elle trouve des sources d'économies importantes.
Pour ce faire, le gouvernement agit principalement sur deux leviers : la réduction du remboursement (et non du taux) des médicaments qui sont dans un groupe générique ; ensuite, dérembourser progressivement sur trois ans les spécialistes pharmaceutiques dont l'efficacité a été jugée insuffisante par la Commission de la transparence chargée de passer en revue l'ensemble de la pharmacopée.
Concernant le premier point, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale devrait instituer un forfait de remboursement par groupe générique fondé sur le générique le moins cher, ou sur la moyenne des prix des génériques. Le gouvernement n'a pas encore tranché sur ce point. Mais, quel que soit le médicament prescrit, quel que soit son prix, le tarif de remboursement sera le même pour tous les médicaments du groupe concerné.
Pour certains observateurs, cela pourrait nuire à la politique même des génériques : le médicament princeps n'a plus intérêt à avoir un prix beaucoup plus élevé que le générique. Mais pour le gouvernement, au contraire, « ce forfait complétera les mesures d'incitation à la prescription des génériques ». Ainsi, a poursuivi le ministre, « chacun reste libre de choisir un médicament princeps ou l'un de ses génériques, mais l'assurance-maladie et donc le cotisant ne paie plus pour sa part le surcoût attaché à sa marque ».
Autre disposition, le déremboursement en trois étapes des spécialistes pharmaceutiques dont le service médical rendu n'a pas été jugé suffisamment efficace par la commission de la transparence. Pour Jean-François Mattei, « cette mesure repose sur deux soucis : celui de la santé publique au regard des produits anciens peu efficaces et parfois déconseillés ; celui d'une solidarité plus adaptée ». Les premières spécialités concernées par ce déremboursement pourraient être certains sirops qui contiennent de faibles doses d'antibiotiques et de cortisone. Leur déremboursement pourrait intervenir dès 2003.
On peut toutefois s'interroger sur l'économie réelle que procure cette disposition, tant ces produits ont aujourd'hui des prix bien bas par rapport au reste du marché et ne sont remboursés pour la très grande majorité d'entre eux qu'à 35 %. Certains économistes affirment même que leur disparition de la liste des médicaments remboursables se traduira par des transferts de prescription qui, à la longue, se révéleront plus chers pour l'assurance-maladie.
Le ministre de la Santé s'efforce quand même de réconforter l'industrie du médicament. En assurant qu'une réforme de la fiscalité qui pèse sur les laboratoires pharmaceutique serait l'un des points essentiels des négociations pour le renouvellement de l'accord entre le gouvernement et l'industrie, il montre sa bonne volonté sur une demande essentielle de l'industrie pharmaceutique, qui souhaite que toutes les taxes soient unifiées, ce que le ministre n'a pas rejeté. De même, la modification de l'assiette de la taxe sur la promotion, réclamée par les industriels, n'a pas été écartée. Enfin, en se déclarant favorable à une évolution des procédures existantes et la mise en place d'un dispositif accéléré au remboursement en ville, il laisse entendre que le gouvernement n'est pas hostile au « dépôt de prix », revendication des industriels, et qui s'apparente au principe de la liberté des prix pour les médicaments innovants au cours de la première année. Mais cette réforme ne dépend pas, semble-t-il, du domaine législatif.

Jacques DEGAIN

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7185