Pour freiner l'évolution des dépenses pharmaceutiques à la charge de l'assurance-maladie qu'il juge trop forte, le gouvernement a décidé, dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2002, d'agir sur plusieurs leviers, comme l'avait d'ailleurs annoncé dès juillet dernier, Elisabeth Guigou, lorsqu'elle avait présenté son plan sur le médicament.
Le texte, qui sera discuté prochainement par les parlementaires, met en place, comme prévu, la possibilité pour les médecins de prescrire en utilisant la dénomination commune internationale (DCI). Il ne s'agira pas d'une obligation et le médecin pourra toujours prescrire les médicaments sous leur nom de marque.
Depuis un certain temps, certaines caisses primaires d'assurance-maladie encouragent déjà les médecins à prescrire en DCI. L'exemple de la Marne est sans doute le plus connu et le fait que la dernière enquête de la Caisse nationale d'assurance-maladie ait montré que ce département était parmi les tout premiers en nombre de génériques délivrés par les pharmaciens a encore plaidé davantage pour la légalisation de la prescription en DCI.
Car, dans l'esprit des partisans de cette réforme, l'avantage de la prescription en DCI est de permettre au pharmacien de délivrer un générique, ou du moins le médicament le moins cher de la classe thérapeutique en question. Encore faut-il qu'il y soit encouragé. La convention signée entre les pouvoirs publics et les représentants des pharmaciens incite à la substitution. De nouvelles discussions ont lieu en ce moment entre les deux partenaires, pour tenter d'encourager encore plus les pharmaciens à délivrer le médicament le moins cher. Mais le projet de loi de financement de la Sécu est très clair à cet égard : en cas de prescription en DCI, « la différence de prix entre la spécialité délivrée et la spécialité la moins chère ne pourra pas être supérieure à un montant fixé par la convention ». Evidemment, ce montant sera faible. La marge de manuvre de l'officinal sera donc étroite.
Taxe sur la pub : augmentation de 50 millions d'euros
Pour limiter les dépenses de médicament, le gouvernement veut aussi agir directement sur le fabricant, c'est-à-dire l'industriel, en alourdissant d'une manière très importante les taxes sur la promotion et la publicité, afin de l'inciter à diminuer ce poste de dépenses. Par exemple, si le projet est voté en l'état, les firmes qui consacrent moins de 10 % de leur chiffre d'affaires annuel à cette information paieront une taxe de 10,5 % (contre 9,5 % auparavant) des sommes consacrées à la promotion ; lorsque l'effort promotionnel des firmes est compris entre 10 et 12 % du CA, la taxe atteindra 17 % (contre 15 % auparavant) ; elle sera de 25 % (contre 18 % auparavant) lorsque les campagnes de promotion auront représenté entre 12 et 14 % du chiffre d'affaires annuel ; enfin, elle sera de 31 %, soit dix points de plus que les années précédentes, lorsque les sommes consacrées à ce poste dépasseront 14 % du chiffre d'affaires. Le rendement supplémentaire attendu par cette contribution est évalué par le gouvernement à 50 millions d'euros, soit 328 millions de francs environ, qui renfloueront (partiellement) les caisses de l'assurance-maladie. Une contribution qui touche d'autant plus les laboratoires qu'ils ne peuvent en aucune manière la déduire de leur déclaration d'impôt sur les sociétés.
Une certaine effervescence
Enfin, la troisième mesure sur le médicament de ce projet de loi fixe le taux de progression du chiffre d'affaires (concernant les médicaments remboursés) au-delà duquel s'applique la « clause de sauvegarde », c'est-à-dire le système de reversement appliqué à l'industrie pharmaceutique. Comme en 2001, ce taux est de 3 %, inférieur à l'ONDAM, fixé, lui, à 3,8 %. Lorsque l'on sait que la croissance du chiffre d'affaires de l'industrie en 2001, selon les derniers chiffres de la Sécurité sociale, devrait s'élever hors taxes à 7,6 %, il semble évident que cette contribution va s'appliquer en 2002. Certes ne devront la payer que les seules entreprises n'ayant pas signé de convention avec le Comité économique des produits de santé. C'est-à-dire très peu en fait. Mais il ne faut pas s'y tromper : les nouveaux accords conventionnels qui seront signés avec les firmes en 2002 devraient l'être en fonction même du rendement que le gouvernement attend de l'application de la clause de sauvegarde.
En clair, l'industrie pharmaceutique ne paiera pas moins de contributions en 2002 qu'en 2001.
Ajoutées aux baisses de prix et de remboursements prévues par le plan Guigou et qui connaissent un début d'application, ces mesures devraient susciter dans les tout prochains jours un certaine effervescence, déjà perceptible dans les milieux industriels.
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