LA CINQUANTAINE de représentants de médecins, kinésithérapeutes et ostéopathes, rassemblés la semaine dernière au ministère de la Santé pour plancher sur la réglementation de l’ostéopathie, sont repartis dos à dos. En dépit de la condamnation du Conseil d’Etat qui l’enjoint de prendre dans un délai de six mois les décrets d’application de la loi Kouchner du 4 mars 2002, qui a officiellement reconnu l’ostéopathie, le gouvernement traîne les pieds. Il a proposé quelques projets de décrets sur le champ et les modalités d’exercice des ostéopathes. Aucun n’a vu le jour sous la pression des syndicats de médecins, du Conseil national de l’Ordre des médecins, de l’Académie de médecine, des syndicats de kinésithérapeutes ou des ostéopathes eux-mêmes. Un nouveau projet vient d’être présenté aux ostéopathes. Il prévoit notamment que l’ostéopathe est tenu d’orienter le patient vers un médecin «lorsque les symptômes nécessitent un diagnostic médical, ou lorsqu’il est constaté une aggravation de ceux-ci, ou que les troubles présentés excèdent son champ de compétence». Ce sont les compétences des ostéopathes exclusifs qui inquiètent justement médecins et kinésithérapeutes (1). Dans un communiqué commun, les kinés ont demandé que «seuls les professionnels de santé, masseur-kinésithérapeutes ou médecins» puissent avoir le titre d’ostéopathe.
Ils ont par ailleurs demandé et obtenu l’ouverture de négociations bipartites avec le gouvernement sur les modalités de mise en oeuvre du dispositif réglementaire attendu. «Il existe un danger de voir se développer des professions de santé sans bases de formation identiques, souligne le Dr Michel Chassang, président de la Csmf. Nous ne voulons pas que les ostéopathes se proclament profession de santé sans avoir acquis une connaissance exhaustive de la médecine.» Pour Alain Bergeau, président de la Ffmkr, il est fondamental que l’exercice de l’ostéopathie soit dans un premier temps réservé aux médecins et aux kinés pour «préserver la sécurité sanitaire des patients». «Nous devons mettre en place un cahier des charges commun pour une formation en ostéopathie de qualité, poursuit le kinésithérapeute. Nous verrons ensuite comment gérer le stock d’ostéopathes formés et en formation.»
Un recours devant le Conseil d’Etat en préparation.
Les quelque 5 000 ostéopathes exclusifs qui exercent en France attendent dorénavant le décret qui doit paraître avant le 27 décembre. «Jamais les trois parties ne s’étaient positionnées de manière aussi radicales, commente Pascal Jarvéliat, du registre des ostéopathes français (ROF). Si le décret à paraître est contraire à l’esprit de la loi du 4mars 2002 et ne reconnaît pas l’exercice de l’ostéopathie exclusive, nous engagerons un recours devant le Conseil d’Etat pour le faire annuler.»
Les ostéopathes ne se font plus d’illusions sur les intentions du ministère de la Santé et ils projettent une manifestation à Paris en décembre. «Cela fait presque cinq ans que la loi n’est pas appliquée et que le gouvernement laisse se développer une profession non contrôlée, commente Jean Fancello, président du Syndicat national des ostéopathes de France (Snof). Certains mettent en avant le danger que nous ferions courir à nos patients. Or le danger serait de faire de l’ostéopathie une spécialisation médicale et paramédicale exercée par intermittence. Je vais payer cette année 259euros de prime de responsabilité civile professionnelle (RCP). Je n’ai pas l’impression d’être considéré par mon assureur comme quelqu’un de dangereux.»
(1) Un communiqué commun a été rédigé par le Collège national de la kinésithérapie salariée (Cnks), la Fédération française des masseurs-kinésithérapeutes-rééducateurs (Ffmkr), Objectif kiné (OK), le Syndicat national des instituts de formation en masso-kinésithérapie (Snifmk), le Syndicat national des masseurs-kinésithérapeutes-rééducateurs (Snmkr), le Syndicat des médecins libéraux (SML), MG-France et la Confédération des syndicats médicaux français (Csmf).
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