De notre correspondante
Pourtant auréolées du patronage de personnalités nationales (dont Jean-François Mattei) et de représentants des instances européennes, les 1res Assises de l'Observatoire international du droit de la bioéthique et de la biomédecine, tenues à Marseille, sont loin d'avoir réuni les 900 participants attendus et d'avoir permis la confrontation d'opinions annoncée dans les programmes.
Comme l'a souligné le président de l'association, Gérard Teboul, professeur à l'université Paris-12, le but de ces assises, envisagées tous les deux ans à Marseille, était pourtant de réfléchir aux évolutions « concevables et souhaitables » du droit.
Le titre, Procréation et droits de l'enfant, induisait la question posée dès l'ouverture : « Qu'est-ce qu'un enfant, et quel est son point de départ ? » Pour une partie des orateurs et des participants apparemment proches de courants internationaux antiavortement, la réponse tomba sans nuance et devint le fil conducteur des débats : un enfant est un être humain dès sa conception. Une table ronde de différents religieux avait d'ailleurs été organisée pour confronter le point de vue des chrétiens, des juifs et des musulmans. Dans une autre table ronde, c'est un prêtre australien, « Salésien de Don Bosco », qui avait été choisi pour traiter de la réduction embryonnaire : il fit à la tribune un long plaidoyer pour la défense des droits du zigote, amalgamé avec le respect de la vie. Un point de vue « loin d'être neutre », comme le souligna un biologiste de la salle, qui mit en garde contre le « mélange des données affectives, religieuses et culturelles » et dénonça les termes péjoratifs utilisés dans les différents propos : embryons « jetés », embryons ou enfants « médicament », recherche de l'embryon « parfait » évoquant l'eugénisme. Il rappela que, pour les scientifiques, on ne peut parler de « début de la vie » au moment de la procréation et que, de toutes façons, « chacune des gamètes présentes avant la fécondation, c'est aussi de la vie ».
L'enfant médicament
Parmi les différents sujets abordés au cours de ces assises, le diagnostic génétique soulève, lui aussi, des problèmes éthiques. Il fut abordé de façon plus nuancée par Amos Shapira, professeur de droit et d'éthique biomédicale à l'université de Tel Aviv. Après avoir rappelé le coût élevé des diagnostics préimplantatoires et des fécondations in vitro pour un taux de grossesse faible et, par ailleurs, les risques entraînés par les biopsies de l'embryon, il insista sur la nécessité d'une bonne évaluation des cas justifiant ces différentes techniques.
Il fut également beaucoup question des enfants donneurs de moelle ou de tissus pour sauver un frère ou une sœur. Avec cette question : les parents ont-ils le droit de décider pour l'enfant ? Plus encore, ont-ils le droit de concevoir un nouvel enfant, et même de le sélectionner pour avoir l'HLA compatible, dans le but de l'utiliser au profit de ce frère ou de cette sœur malade ? Des différentes opinions exprimées sortit un consensus semblant admettre ce don forcé à condition que l'enfant conçu pour sauver son aîné soit désiré et aimé en tant qu'enfant à part entière, et que l'intégrité et la santé de ce nouvel enfant ne soit pas affectée par l'intervention (en France, le don d'organes des mineurs est de toute façon interdit). Avec, toujours, cette ambiguïté du thème du congrès : à partir de quand un enfant est-il un enfant ? Et, pour ceux qui lui donnent une « âme » dès la conception, l'interdiction de toute utilisation d'embryon, fut-ce pour sauver un enfant déjà bien réel.
Conscient de la nécessité de fixer des limites à la science médicale, Amos Shapira propose ainsi que la société mette « des feux rouges, des feux verts ou des feux clignotants » et qu'il revienne aux comités d'éthique de juger au cas par cas les situations appelant des mesures particulières.
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