Des patients consultant leur généraliste par internet et se faisant envoyer une ordonnance par e-mail... Ce scénario annoncé dans la presse par Roselyne Bachelot, à l’automne dernier avant de quitter son ministère, avait un peu pris les acteurs de la télésanté de court, obligeant son cabinet à rectifier la communication dans les jours suivants. En réalité, si les décrets d’application de la loi HPST, parus à la fin du mois d’octobre 2010, ouvrent effectivement la voie à des nouveaux développements en télésanté, la « téléconsultation » en premier recours reste encore largement du domaine de la science-fiction. En effet, même s’ils sont de plus en plus avides d’informations et de conseils par internet, les patients ne semblent pas encore mûrs pour passer à la consultation virtuelle. Selon un sondage ViaVoice que le Groupe Pasteur Mutualité a fait réaliser, 81 % des personnes interrogées ne sont pas prêtes à consulter un médecin sur le web, les plus réticents étant les patients les plus âgées (à peine 7 % des plus de 65 ans seraient partants) et, de façon plus surprenante, la génération internet (14 % des 18/24 ans ne veulent pas de téléconsultation).
Que dit exactement le décret à propos de la téléconsultation ? Elle a « pour objet de permettre à un professionnel médical de donner une consultation à distance à un patient » sachant qu’un « professionnel de santé peut-être présent auprès du patient et, le cas échéant, assister le professionnel médical au cours de la téléconsultation ». Nous sommes bien loin de l’image du malade à son domicile qui brancherait sa webcam pour consulter son médecin traitant. « Peut-être qu’en 2030, on fera des téléconsultations de médecine générale, relativise le Dr Pierre Simon, président de l’Association nationale de télémédecine. Mais il y a d’abord des problèmes à résoudre à commencer par celui de la confidentialité sur le web. Ensuite, les patients les plus âgés sont très loin d’y être préparés ». Il reste que le champ des possibilités d’utilisation de ces technologies en médecine générale est très prometteur, mais dans un cadre où le généraliste n’est pas de l’autre côté de l’écran mais bien à côté de son patient. « Aujourd’hui, la téléconsultation c’est d’abord la possibilité pour un patient d’avoir une consultation de spécialiste en particulier de suivi en étant accompagné d’un généraliste, explique ce néphrologue. Soit c’est une discussion de médecin à médecin, soit le spécialiste interroge le patient en présence de son confrère ».
Les expérimentations se multiplient depuis plusieurs années. Les décrets qui ont été publié ont tout simplement vocation à leur donner un cadre juridique et à envisager leur rémunération de manière plus pérenne. La balle est désormais dans le camp des ARS qui ont jusqu’à la fin de cette année pour construire leur « plan télémédecine » avec pour objectif d’améliorer l’accès aux soins, la qualité des soins et l’efficience du système de santé. Ensuite, les agences pourront contractualiser avec des établissements et des libéraux pour organiser ces nouveaux modes de prises en charge. Pour sa part, l’Assurance-maladie commence à réfléchir à la façon dont elle pourra intégrer les actes de télémédecine dans la CCAM. D’autant, que pour l’heure, l’acquisition d’un équipement pour un cabinet de ville reste onéreuse. Le député UMP Pierre Lasbordes, auteur en octobre 2009 d’un rapport remis à Roselyne Bachelot sur la télésanté, évalue le coût pour « accéder aux données du patient, recueillir et transmettre des données et procéder à de la téléconsultation avec un moyen de visioconférence de bonne qualité entre 5 000 et 20 000 euros »...
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