SI LA DERNIÈRE POSITION du PS qui tienne encore debout, c'est l'éthique politique, par opposition à la proposition politique, alors, cela veut dire que le PS est en déroute avant d'avoir livré bataille. D'autant qu'il lui est difficile d'aligner des arguments valables : la présence d'un président dans une campagne pour les élections législatives, cela s'est déjà vu sous la Ve ; M. Sarkozy, par ailleurs, n'entend pas multiplier les irruptions dans le débat électoral et on ne voit pas ce qu'il y aurait de malséant à militer pour avoir une majorité présidentielle quand on est le président.
Une bataille de mauvaise qualité.
Mais la question n'est pas là : elle se situe très exactement dans la très mauvaise qualité d'une bataille qui aurait dû se dérouler front contre front, projet contre projet, et se livre au contraire par échauffourées, agressions verbales et attaques subversives nullement destinées à gagner la guerre, mais seulement à affaiblir l'adversaire, si c'est encore possible, en décrivant ses turpitudes.
Les socialistes croient encore qu'ils ont le monopole de la morale, sinon du coeur. Peut-être l'ont-ils d'ailleurs, pour autant qu'ils fassent ce qu'ils disent. Mais enfin, n'est-ce pas Edith Cresson qui envisageait d'expulser les immigrants clandestins par charters, et n'est-ce pas la gauche qui a poussé des cris d'épouvante quand M. Sarkozy a fait, onze ans plus tard, ce que la première femme Premier ministre avait proposé ?
On ne niera pas, toutefois, que la gauche a beaucoup apporté au pays, surtout en matière de moeurs, de modernisation de la société, de démolition des tabous stériles, de simplification des rapports entre citoyens, de décontraction, pourrait-on dire, d'une société coincée dans ses préjugés. On ne niera pas davantage qu'elle est moins souvent prise en défaut, pour ce qui est des corruptions ordinaires de la République, que la droite. Qu'elle a fait souffler, par exemple en 1981, un vent salutaire qui a libéré nombre de talents quand il ne les a pas révélés.
Mais la gauche, c'est aussi le « On a tout essayé » (contre le chômage) fataliste de François Mitterrand ; c'est tout de même ce que même la droite n'ose pas encore dire, cette abomination économique qu'a été la semaine de 35 heures au moment de la libéralisation des marchés mondiaux ; c'est encore quelques scandales auxquels le mouvement politique qui porte sa pureté en bandoulière est lié ; mais à quoi bon ? Il n'est pas utile d'entrer dans les querelles de personnes ou sur le passé auquel le PS voudrait limiter la campagne.
LA STRATEGIE DU DENIGREMENT REPETITIF ET INCESSANT
Une gauche muette.
Pour 2007, qu'est-ce que les socialistes avaient prévu ? Qu'ils gagneraient la présidentielle sans présenter de projet innovant et crédible ? Et s'ils perdaient, qu'ils feraient campagne sur les traits de caractère de M. Sarkozy, ou sur les malheurs jupitériens qu'il infligerait délibérément au peuple qui l'a élu ? En fait, ils n'ont prévu ni de perdre ni de gagner. En 2002, ils ont négligé le problème de la sécurité ; en 2007, ils font de M. Sarkozy et de lui seul l'insécurité de tous les Français.
C'est un peu gros. Et ils n'iront nulle part de cette manière. On approuvera donc le slogan de François Bayrou (qu'il n'a pas appliqué dans ses propres jugements sur M. Sarkozy, homme trop « dangereux » pour qu'il lui accordât son vote) : nous en avons assez de ce climat de guerre civile. Car le mandat de M. Sarkozy est parfaitement légitime et il ne suffit pas de le dire, il faut se comporter conformément à cette légitimité, reconnue par la gauche le 6 mai dès 20 heures. A ce titre, le président ne mérite ni état de grâce particulier, ni indulgence, ni servilité. Mais il a un mandat de cinq ans. Et si chacun d'entre nous a assez de bon sens pour attendre quelques résultats de l'action gouvernementale à venir, pourquoi tenter de bloquer cette action par des considérations dont le niveau ne dépasse pas celui des conversations de salon, au lieu de tenter d'orienter cette action dans le seul sens qui convienne à l'opposition ?
On n'a rien essayé.
L'enjeu porte-t-il sur les goûts personnels de M. Sarkozy en matière de voyages et de vacances, ou sur la nécessité ardente de trouver un emploi pour chaque chômeur français ? L'enjeu est-il de savoir s'il est juste que le président participe à la campagne, ou de trouver un logement décent à chaque citoyen qui vit dans un taudis ? Et surtout, pourquoi, après « avoir tout essayé », ne pas tenter ce qui n'a jamais reçu d'application en France, par exemple la défiscalisation des heures supplémentaires à laquelle de très sérieux experts voient déjà beaucoup d'inconvénients dirimants ? Pourquoi ramener chaque action, et même chaque proposition, sur le terrain de la discussion, de la dispute, de la querelle entre beaux esprits, pendant que la France se morfond et attend les soulagements qui ne sont pas plus tôt promis par Paul qu'ils sont combattus, et même diffamés, par Pierre ? Qu'est-ce que c'est que cette stratégie du dénigrement répétitif et incessant, hissé au niveau d'objectif final, alors que les élections législatives ne sont pas terminées, et que le gouvernement définitif de François Fillon n'est pas constitué ?
On n'a rien essayé. On n'a pas essayé ce qu'une culture pétrie par des siècles de christianisme et par des décennies de marxisme nous a empêchés de faire. A tout prendre, faire une expérience, même si elle devait échouer, vaut mille fois mieux qu'une passivité devant l'infortune que nous attribuons confortablement à la perversité des autres, du monde ou du climat, alors que nous avons assez d'énergie pour nous lever et nous battre.
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