LE MINISTRE DE LA SANTÉ a reçu séparément les quatre organisations syndicales de médecins hospitaliers - CHG, CMH, Inph, Snam-HP - en début de semaine pour discuter de la nouvelle version de son projet sur la gouvernance des établissements publics de santé, la troisième en deux mois.
On retrouve dans cette dernière mouture les grandes lignes des précédents projets, à savoir l'organisation des hôpitaux en pôles d'activités, la politique de contractualisation interne et la création d'une instance paritaire de pilotage médico-économique, appelée désormais conseil exécutif. N'y figure plus, en revanche, la disparition des services hospitaliers, une disposition qui avait provoqué une levée de boucliers chez les médecins. Le maintien des services et des chefs de service ainsi que la restauration des attributions des instances classiques ont apaisé les craintes des syndicats. « On a la preuve écrite que le comité exécutif ne se substituera pas à la CME (commission médicale d'établissement) et au conseil d'administration », explique avec soulagement le Dr Pierre Faraggi, président de la Confédération des hôpitaux généraux (CHG). Après négociation, le ministre semble disposé à accorder aux chefs de service la responsabilité de l'activité médicale, des pratiques professionnelles et de l'évaluation des soins au sein de leur unité. Cette mesure, qui n'apparaissait pas dans la troisième mouture du projet, réjouit le Pr Claude-François Degos, le président du Syndicat national des médecins, chirurgiens, spécialistes et biologistes des hôpitaux publics (Snam), qui parle de « sacrée marche arrière du gouvernement ».
Plusieurs points litigieux.
Pour autant, le dossier n'est pas bouclé. Des divergences demeurent, « et pas des moindres », reprend Pierre Faraggi. « Le ministre reste attaché à l'idée d'une nomination locale des chefs de pôle et des chefs de service, par décision conjointe du directeur et du président de Cme. Installer l'ensemble des responsables médicaux dans une subordination au directeur de l'établissement nous paraît dangereux », explique le président de la CHG, qui conditionne sa signature au retrait de ce point. La présidente de l'Intersyndicat national des praticiens hospitaliers (Inph), le Dr Rachel Bocher, est tout aussi opposée à ce système « d'allégeance » : « Les chefs de service doivent continuer à être nommés par le ministère de la Santé, souhaite-t-elle . Quant aux chefs de pôle, ils pourraient l'être par le conseil d'administration de l'hôpital. » En dépit des efforts consentis par le ministre de la Santé qui a revu à la baisse son projet, Rachel Bocher estime qu' « il reste beaucoup de chemin à parcourir pour y faire adhérer tous les praticiens hospitaliers ». Elle réclame une meilleure représentation des PH au sein des instances des CHU, et une organisation en pôles basée sur un mode incitatif, et non obligatoire (avant la fin 2006, prévoit le texte), sans quoi elle ne signera pas le projet. Le Pr Degos s'inquiète, quant à lui, de la possibilité pour le conseil d'administration de constituer à titre expérimental un comité d'établissement, présidé par le directeur et qui viendrait remplacer pendant quatre ans la CME et le comité technique d'établissement (CTE). « Le risque est grand que la CME soit court-circuitée et qu'elle disparaisse un jour », dit-il.
Une nouvelle journée nationale d'action.
Les syndicats découvriront si leurs remarques ont été retenues par Jean-François Mattei en lisant la quatrième version de son projet ces jours-ci. Et c'est le 19 janvier que le ministre les réunira tous en vue d'une signature. Dans tous les cas, la CHG, la CMH et l'Inph appelleront à la mobilisation le 22 janvier. Car, comme l'explique Rachel Bocher, « les difficultés de l'hôpital sont réelles, et ce n'est pas une réforme de la gouvernance qui va les résoudre ». Mardi, le front intersyndical qui comprend également la CGT, FO Sud et la Cftc, a confirmé son appel à une journée nationale d'actions et de grève. Les sept syndicats « exigent l'ouverture de réelles négociations intégrant la question de la démographie, des effectifs, de la formation, des statuts et des moyens financiers supplémentaires ».
Un dossier qui divise les médecins hospitaliers
D'un côté, les conférences de présidents de CME. De l'autre, les organisations syndicales. Selon leur appartenance, les médecins hospitaliers affichent des positions très différentes, pour ne pas dire divergentes, à propos du projet ministériel de réorganisation interne des hôpitaux publics. Le Pr Pierre-Antoine Fuentes, à la tête de la Conférence des présidents de CME de CHU, a affirmé clairement dans nos colonnes (« le Quotidien » du 9 décembre) son soutien au projet de Jean-François Mattei. « C'est toujours difficile de s'attaquer à une nouvelle réforme, mais celle-ci est nécessaire, indispensable, disait-il. On ne voudrait surtout pas que le gouvernement revienne dessus. » De son côté, le Dr Francis Fellinger, président de la Conférence des présidents de Cme de CH, a affirmé un soutien sans faille au projet gouvernemental dans un courrier adressé à l'ensemble des présidents de CME de CHG. Une démarche qui a fait bondir les présidents de l'Inph, de la CMH et de la CHG : dans un communiqué commun, les trois syndicalistes désapprouvent leurs confrères, et marquent leur « désapprobation à voir les présidents de CME, élus part leurs pairs, prendre, sans débat, des dispositions si éloignées de celles défendues par la grande majorité de la profession ». Les trois présidents de syndicats appellent les présidents de Conférence à revoir leur position, et espèrent que « ces divergences regrettables seront remplacées par la mobilisation de tous au service de l'hôpital public ».
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