A l'impossible, nul n'est tenu. C'est en substance ce que s'efforce d'expliquer depuis quelque temps Jean-François Mattei qui présentera au début d'octobre, en conseil des ministres, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2003.
Dans une tribune libre publiée par « le Figaro » daté du samedi 31 août, le ministre de la Santé a tenté de déminer le terrain sans pour autant promettre monts et merveilles au corps médical, qui reste très mobilisé en ville comme à l'hôpital.
Evoquant « son » premier PLFSS, le ministre souligne qu' « il est exclu de remettre en quelques mois dans le bon sens ce que nos prédécesseurs ne sont pas parvenus à réaliser ou, même, ont contribué à détériorer en cinq ans ». Autrement dit, certaines réformes de fond attendront. « Tout n'est pas possible tout de suite en dépit des attentes et des frustrations qui sont très fortes, insiste Jean-François Mattei . 2003 sera nécessairement une année de transition portant encore la trace du passé mais aussi l'empreinte du futur. » Dès juillet, le ministre avait d'ailleurs avoué aux députés que, pour cette année, le PLFSS était « en grande partie dessiné et orienté ».
Le piège de l'ONDAM
Confronté à la dégradation des comptes de la Sécurité sociale (2,4 milliards d'euros de déficit estimé pour le régime général en 2002 et 5,6 milliards d'euros pour la branche maladie), Jean-François Mattei mesure aujourd'hui l'ampleur de la tâche et reconnaît lui-même que la « situation est tendue ». Un expert du secteur, proche du gouvernement, résume la réalité politique et comptable en termes plus directs. « C'est le même type de situation et de contexte qu'en 1995, mais en pire, affirme-t-il. Le gouvernement est écartelé entre l'estimation des coûts, les promesses de Chirac et les critères européens. » Quant à la fixation de l'objectif national de dépenses d'assurance-maladie (ONDAM) pour 2003, ce spécialiste y voit un piège. « Il y a un risque de mauvais choix, quelle que soit la décision prise, analyse-t-il. Soit on fixe un ONDAM à 3 %, et il sera à nouveau dépassé, soit on décide au contraire d'être réaliste en arrêtant un objectif autour de 8 %, et on sort des clous, ce qui pose d'autres problèmes... »
Tarification à la pathologie : le flou domine
Alors que les spécialistes, mais aussi les établissements hospitaliers, réclament une bouffée d'oxygène immédiate, Jean-François Mattei voudrait ne pas entamer le capital de sympathie dont il bénéficie dans le corps médical. Il lui faut donc entretenir l'espoir. Dans sa tribune au « Figaro », le ministre rappelle une fois encore les « lignes directrices » de sa politique. Nouvelle lisibilité des finances sociales, clarification des rôles de l'Etat et de l'assurance-maladie, primauté donnée à la prévention et aux actions de santé publique (une grande loi de programmation est attendue en 2003), réflexion concrète sur le « panier de soins », c'est-à-dire les dépenses que la solidarité doit prendre en charge, ou encore responsabilisation du patient : autant de priorités qui doivent conduire, selon les termes de Jean-François Mattei, à une « nouvelle logique » dont le PLFSS 2003 sera la première étape. Sous-entendu : cette nouvelle donne tranchera, notamment, avec les années de culpabilisation des seuls professionnels de santé.
Garde et astreintes : MG-France veut des fonds dédiés
Sur certains sujets, en tout cas, les professionnels de santé ne se contenteront pas d'un horizon à plusieurs années. « J'encourage vivement le gouvernement à imprimer fortement sa marque dès cette année », martèle le Dr Michel Chassang, président de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), en évoquant « tout ce qui touche à la maîtrise et à l'ONDAM ». Un sentiment partagé par le Dr Pierre Costes, président de MG-France, pour qui le PLFSS 2003 doit absolument apporter une série de réponses. « A travers la fixation de l'ONDAM, explique-t-il, le gouvernement doit montrer qu'il investit fortement sur la médecine ambulatoire, ce qui signifie que le taux d'évolution des soins de ville devra être au moins équivalent ou supérieur à celui de l'hôpital, notamment pour donner de l'air aux tarifs des actes. » Le Dr Costes demande également que le PLFSS 2003 permette la création « de fonds dédiés pour pérenniser les moyens affectés à l'astreinte, à la garde médicale, mais aussi à tout ce qui résulte de la judiciarisation de l'exercice ». De son côté, l'Union collégiale des chirurgiens et spécialistes français (UCCSF) estime qu' « une décision politique s'impose maintenant » concernant la réforme des tarifications hospitalières, à l'heure où le calendrier d'une éventuelle mise en place de la tarification par pathologie demeure toujours très flou.
On le voit, si Jean-François Mattei pourra arguer à juste titre d'un calendrier serré, tout ne lui sera pas pardonné.
Jean Bardet (UMP), rapporteur sur l'assurance-maladie
Les rapporteurs du PLFSS ont été désignés. Jean Bardet (UMP, Val-d'Oise), cardiologue, prend en charge le volet assurance-maladie. Yves Bur (UMP, Bas-Rhin), chirurgien-dentiste, s'occupera des équilibres budgétaires (volet recettes/dépenses) tandis que Denis Jacquat (UMP, Moselle), ORL, a la responsabilité de l'assurance vieillesse.
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