ARTS
Dans le grand mouvement d'innovation qui marque l'aventure plastique du XX° siècle, Campigli s'est fabriqué son propre domaine. C'est bien le trait principal de toute uvre qui perdure. Chacun à son chiffre attaché, à son style fidèle, serait-il tenté d'évoluer, de varier à l'intérieur des limites qu'il s'est fixées.
Quelque chose d'étrange
On reconnaît un Campigli par la constance de son contenu figuratif, sa palette aux tonalités réservées que l'on dirait venues du mur, d'une tradition, avec quelque chose d'étrusque dans la raideur tendre, la mystérieuse réserve des rythmes, le hiératisme moins cérémonieux qu'attentif et méditatif.
« Campigli est aux femmes ce que Morandi est aux bouteilles », aura dit un critique, soulignant là qu'avec un catalogue volontairement réduit de formes, de sujets, on peut construire une uvre qui fonctionne moins par son éclat, ses aventures que la constance et l'obstination d'une recherche qui s'intériorise progressivement. De la femme, d'abord observée avec la tendresse du portraitiste, Campigli passe à une sorte de chiffrage de la féminité, un jeu de silhouettes rappelant celles d'un jeu de cartes.
La clef de cette uvre volontairement limitée en ses sujets est l'enfance même, marquée par un traumatisme familial, une situation ambiguë - il ne perce le secret de sa naissance (enfant naturel) qu'à l'adolescence et est, jeune, entouré de femmes dont ses deux surs. Venu à Paris, il y est le correspondant du journal « Corriere della Sera ». Pourtant, c'est la peinture qui l'attire et il fréquente assidûment les hauts lieux de la vie artistique fixée à Montparnasse. Il sera bientôt invité à la Biennale de Venise et, du même coup, projeté dans une gloire qui, pour s'être en France altérée après sa mort, ne l'a pas trahi en Italie. La galerie Jeanne Bucher, qui aura été dans l'entre-deux-guerres un véritable laboratoire central de l'art moderne, puis la galerie de France après la Libération, participent à la diffusion de son uvre et à sa reconnaissance.
Métamorphoses
L'exposition retrace les étapes de sa tenace recherche. De métamorphose en métamorphose, il passe de la femme nimbée du charme du souvenir à ces figures d'icônes entraînées dans des compositions savoureuses et savantes, « semblables à des jeux d'échecs ». S'aventurant, en douceur, dans l'univers de l'éternel féminin, dans ses secrets autant que dans ses grâces.
Campigli (1895-1971), commissaire Pierre Schneider, Mona Bismarck Foundation, 34, avenue de New York. Jusqu'au 13 octobre.
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