DANS UN LIVRE d'entretiens intitulé « Et si on se retrouvait... » (1), Martine Aubry pose des jalons dans la perspective du congrès de Reims du PS à la mi-novembre. Elle y défend, entre autres, son action lorsqu'elle avait la Sécu et la Santé sous sa coupe (pour s'implanter dans le Nord, la maire de Lille avait lâché à l'automne 2000 les manettes de son vaste ministère de l'Emploi et de la Solidarité).
Dopée par de récents sondages – les militants du PS la placent dans le trio de tête de leurs personnalités favorites, derrière Bertrand Delanoë et Ségolène Royal –, Martine Aubry est revenue depuis quelques mois sur le devant de la scène politique nationale. Contrairement au maire de Paris, elle ne postule pas officiellement pour l'instant au poste de premier secrétaire du PS, même si elle s'est rapprochée dernièrement de cadres fabiusiens et strauss-kahniens. «Aujourd'hui, je souhaite être plus fortement présente, explique-t-elle dans son livre. Je veux aider à ce que nous retrouvions la politique, je l'ai dit, et à retrouver la gauche. Le travail est immense (...) » Alors que la guerre de succession à François Hollande fait rage, Martine Aubry souligne que «les Français ne demandent pas (au PS) quel est notre champion, mais quelles sont nos propositions. Ne soyons pas frileux de ce que nous sommes».
À cet égard, l'ex-ministre de l'Emploi et de la Solidarité revendique d'ailleurs haut et fort son propre bilan dans le gouvernement Jospin (1997-2000). Et pourtant, elle «aurait voulu être ministre de la Culture, mais Lionel Jospin ne l'a pas souhaité».
«On me parle toujours des 35heures, confie Martine Aubry dans son livre. Mais, pour moi, le travail le plus complexe, le plus lourd, a été celui du rétablissement des comptes de la Sécurité sociale [équilibre atteint en 2000, NDLR] : 50% du résultat vient des recettes complémentaires de la croissance, 50%, des politiques structurelles mises en place.» Parmi les mesures d'économies qu'elle a prises, les radiologues et les biologistes se souviennent avec aigreur des baisses de leurs lettres clés. Évoquant cet épisode, l'ex-ministre argue qu'il s'agissait de «repenser les tarifs des médecins spécialistes en mettant fin à certaines situations acquises injustifiées (...). Que de discussions, que de conflits, et finalement des négociations réussies et des résultats pour la Sécurité sociale! Et donc pour les Français», résume-t-elle.
La Couverture maladie universelle (CMU) reste «la réforme dont (elle est) le plus fière». «Qui en parle à gauche?», interroge-t-elle plus loin, déçue que le bilan du gouvernement Jospin (une «dream team», selon elle) ait été totalement balayé par l'échec cuisant du PS à l'élection présidentielle de 2002.
Aujourd'hui, «notre système de santé est excellent, surtout grâce à l'hôpital public», estime Martine Aubry. Sachant que «les dépenses de santé vont continuer à progresser», l'ex-ministre refuse de prendre «le chemin d'une privatisation de la protection sociale» qui se dessine. Les progrès médicaux, la recherche scientifique nécessitent «des investissements massifs», sans compter les «besoins croissants de prise en charge de la dépendance». «Il faut donc débattre du prix que nous sommes prêts à payer pour cette qualité croissante de soins et de santé», conclut la maire de Lille, qui suggère de «demander leur avis aux Français» lors d'un «grand débat public, éclairé par des experts».
(1) Livre d'entretiens avec Stéphane Paoli et Jean Viard, Editions de l'Aube, 205 pages, 19,20 euros.
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