A Marseille, MSF change d'activités

Publié le 02/07/2001
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De notre correspondante

D EPUIS l'ouverture de son antenne marseillaise, il y a treize ans, Médecins sans Frontières se battaient pour que les « très pauvres » puissent être soignés comme tout autre citoyen. En attendant, ils palliaient les besoins en soignant dans une unité mobile ceux qui ne pouvaient être accueillis ailleurs et avaient ouvert avec Médecins du Monde et l'Armée du salut une petite unité de vingt lits « d'hébergement pour soins ».

Comme le rappelle le Dr Jean-Paul Belmondo, coordinateur MSF des Bouches-du-Rhône, il ne s'agissait pas d'un service hospitalier, mais seulement de l'équivalent d'un domicile pour ceux qui n'en avaient pas et ne pouvaient suivre un traitement dans la rue. Depuis 1995, 400 personnes y ont été accueillies pour des séjours allant de huit jours à trois mois, pendant lesquels une assistante sociale les aidait aussi à retrouver leurs droits et cherchait une solution pour leur sortie. Dans cette unité d'hébergement et dans le bus de soins, les médecins bénévoles ont réalisé 60 000 consultations et les assistantes sociales 120 000 entretiens. Aujourd'hui, tous saluent les avancées de la CMU, tout en regrettant le retard pris par les Bouches-du-Rhône, où trois semaines sont encore nécessaires pour l'ouverture des droits, alors que cette opération ne demande qu'une heure, à Lille par exemple. D'autre part, un accord a enfin été trouvé avec l'Assistance publique de Marseille, qui a créé cinq antennes d'accueil dans ses établissements ; ici, seule l'absence de délivrance de médicaments en fin d'hospitalisation pose encore problème, du fait, justement, des trois semaines de carence de CMU. Mais la situation n'a plus de commune mesure avec celle des années précédentes, et devrait s'améliorer rapidement. « On ne va donc pas continuer à soigner les pauvres dans un système à part, alors que le système général peut les accueillir, car les soins humanitaires dans un pays au système de santé pléthorique étaient un scandale », explique le Dr Noëlle Lasne, responsable de la Mission France de MSF.

Les jeunes et les étrangers

Grâce aux énergies et aux finances ainsi libérées, MSF-Marseille peut se lancer sur de nouvelles pistes. Médecins et assistantes sociales ont déjà ouvert un centre de santé, à Marignane cette fois, pour y suivre les jeunes de cette zone située à l'est de l'étang de Berre, région semi-rurale où les petites villes ont grandi trop vite et où les jeunes des cités, notamment, sont exclus géographiquement des soins, de la prévention et même de la simple information sanitaire ou sociale.
Autre plan de bataille : l'accès aux droits sociaux des étrangers en situation régulière ou irrégulière. Depuis la fermeture il y a deux ans de la Maison de l'étranger, qui effectuait un gros travail d'information et d'accompagnement, ces populations de diverses origines « sont la lanterne rouge de l'accès au droit », estime le Dr Lasne. Pour avoir vécu sur le plan médical le problème de la barrière des langues, elle insiste sur l'importance d'une plate-forme d'interprétariat qui va être mise en place incessamment : tous les services et les professionnels sanitaires ou sociaux devant parler à un étranger auront un numéro de téléphone à leur disposition, avec des interprètes des différentes langues rencontrées dans une ville aussi cosmopolite que Marseille. Une façon de permettre aux personnes marginalisées de bénéficier d'autres services que ceux des organismes humanitaires.

Françoise CORDIER

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6949