Depuis la naissance de Louise Brown, premier bébé-éprouvette, en juillet 1978, plus d'un million d'enfants sont nés grâce une technique d'AMP. Aujourd'hui, selon l'étiologie de l'infertilité, le couple a recours soit à une stimulation simple de l'ovulation, soit à une stimulation suivie d'une insémination intra-utérine de sperme du conjoint ou d'un donneur, soit à une fécondation in vitro ou à une injection intracytoplasmique de spermatozoïde (ICSI).
Les risques potentiels pour l'enfant à naître sont de divers ordres : les problèmes périnatals (prématurité, hypotrophie) sont essentiellement liés aux grossesses multiples plus fréquentes en AMP ; les anomalies congénitales chromosomiques ou non ne semblent pas être augmentées dans la plupart des études (excepté dans certains cas d'ICSI) ; enfin, on manque de données et de recul pour juger de problèmes à plus long terme (troubles psychologiques, cancers, infertilité, etc.).
Des données rassurantes
Un travail conduit (en 1997) par le Pr François Olivennes a consisté à contacter par téléphone l'ensemble de la cohorte des enfants conçus dans le service entre 1982 et 1989 (soit 375 enfants), afin de recueillir des données sur le développement et l'état de santé de ces jeunes alors âgés de 6 à 13 ans. A l'issue de cette enquête, les auteurs n'ont pas noté d'anomalies de poids et de taille, de particularités concernant les problèmes médicaux habituellement rencontrés chez les enfants, ni d'augmentation des malformations. Les performances scolaires étaient bonnes. Ce travail a eu le mérite d'étudier l'ensemble de la cohorte des enfants nés dans le service dans les années 1982-1989 (avec un faible pourcentage de perdus de vue : 9 %), de bénéficier d'un recul de plusieurs années (entre six et treize ans) et de porter sur près de 400 sujets ; en revanche, il n'y avait pas de groupe contrôle et le recueil des informations se faisait par téléphone.
La plupart des travaux, dont celui de Saunders en 1996 (Australie), n'ont pas retrouvé de problème particulier liés à la FIV, excepté des complications périnatales plus fréquentes dans le groupe des grossesses multiples.
Les problèmes spécifiques à l'ICSI
En outre, le lien entre l'ICSI et la transmission d'anomalies chromosomiques mérite d'être étudié ; en effet, l'ICSI permettant à des hommes a priori infertiles d'avoir des enfants, le risque de transmission de microdélétions sur le bras long du chromosome Y est plus élevé que dans la population générale ; de même, l'agénésie des canaux déférents étant plus fréquente chez les hommes porteurs d'une mutation du gène CFTR impliqué dans la mucoviscidose, le risque de transmission est lui aussi plus élevé. Une enquête génétique peut aider à la prise de décision.
Quant aux malformations congénitales, elles sembleraient, elles aussi, très légèrement augmentées en cas d'ICSI. A. Ericsson a montré une plus grande fréquence des anomalies du tube neural, d'atrésie de l'oesophage et d'hypospadias après ICSI, mais pas en cas de FIV seule. Maryse Bonduelle n'a pas retrouvé d'augmentation du taux d'anomalies.
Enfin, les données relatives au développement intellectuel des enfants conçus par ICSI ou FIV sont encore plus parcellaires et ne permettent de tirer aucune conclusion.
De la même façon, on ne dispose quasiment d'aucune donnée sur l'éventualité de pathologies d'apparition tardive.
Un programme de suivi
En conclusion, le Pr François Olivennes souligne que le seul risque véritablement identifié est lié aux grossesses multiples, incitant à limiter le nombre d'embryons réimplantés. Il insiste néanmoins sur la nécessité de disposer de données sur le suivi à court moyen et long terme des enfants.
Dans ce contexte, il s'est intéressé à l'initiative lancée par la société Follow up créée par une patiente ayant bénéficié d'AMP. Créée en 1998, Follow up a pour objectif d'organiser le suivi des enfants conçus dans les centres d'AMP (21 adhérents à ce programme). Le principe est simple : au moment où le couple entre dans un protocole de soin, il lui est proposé d'accepter un programme de suivi, comprenant un premier contact téléphonique entre 4 et 5 mois de grossesse, un deuxième entre 7 et 8 mois et un troisième au retour à la maison avec bébé ; puis un envoi de questionnaires à la naissance, 4 mois, 9 mois, 1 an, 2 ans et 3 ans. Ces questionnaires ont été élaborés avec un comité scientifique mis en place par Follow up. Le coût du recueil des données est pris en charge par les centres d'AMP adhérents, soutenus dans cette action par le Laboratoire Serono, qui souhaite ainsi aider ses partenaires médecins à combler le manque d'informations sur le devenir des enfants nés par AMP.
Conférence organisée dans le cadre de la 23e Session du Club Santé, avec la participation du Pr François Olivennes (hôpital Cochin, Paris), de Chantal Ramogida (directrice de Follow up) et du Pr Jean-Noël Hugues (hôpital Jean-Verdier, Bondy), et avec le soutien du Laboratoire Serono.
Stimulation de l'ovulation : l'intérêt des hormones recombinantes
Durant près de quarante ans, les hormones sexuelles utilisées en thérapeutique étaient issues des urines de femmes ménopausées (FSH et LH) ou enceintes (hCG). Les besoins croissants en quantité et en qualité ont incité à développer des produits recombinants, disponibles depuis cinq ans. Une métaanalyse, évaluant l'efficacité des produits recombinants par rapport à leurs équivalents urinaires, a montré leur supériorité par rapport aux produits antérieurs avec une réduction globale des besoins en hormones. Parmi les autres avantages, on observe moins de réactions locales au point d'injection et on bénéficie d'une plus grande constance d'activité d'un lot à l'autre. Ainsi, le produit final peut être délivré par une simple mesure pondérale (en microgrammes), évitant le recours au classique test biologique dont les imperfections sont notoires. Cette nouvelle formulation en « filled by mass » constitue une avancée considérable car elle garantie une plus grande reproductibilité de la réponse clinique chez une même patiente.
Dr D. C.
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