Israël et les Etats-Unis imposent une déclaration obligatoire de tous les cas de paludisme survenus sur leur territoire. Il s'agit soit de personnes qui ont vécu en pays impaludé, qui présentent un accès palustre dans ces deux pays, soit de voyageurs qui ont fréquenté des zones d'endémie. On estime que chaque année 30 millions de personnes vivant dans les pays du Nord visitent des régions où une chimioprophylaxie antipaludéenne reste nécessaire.
Entre 1994 et 1999, 307 cas de paludisme ont été recensés en Israël chez des sujets ayant voyagé en zone impaludée : dans 50,8 % des cas, il s'agissait d'une infection par Plasmodium vivax, 44 % des cas étaient liés à P. falciparum, 1,6 % à P. ovale et 1,3 % à P. malariae. Chez 7 autres personnes, l'origine était indéterminée et 6 cas étaient en rapport avec une double infection. Toutes les infections par P. falciparum sont survenues dans les deux mois après le retour en Israël. Respectivement, 72 % et 17,8 % de ces infections ont eu lieu chez des personnes n'ayant pas suivi de traitement chimioprophylactique ou ayant pris ce traitement de façon non conforme aux prescriptions. Seulement 14 de ces patients avaient effectivement pris un traitement actif (méfloquine ou doxycycline) selon le schéma thérapeutique prédéfini. A l'inverse, 133 des 161 personnes infectées par P. vivax ou P. ovale ont déclaré leur maladie plus de deux mois après leur retour de voyage et plus de 81 % d'entre elles avaient pris un traitement chimioprophylactique adapté au cours de leur voyage.
P. vivax ou P. ovale
Aux Etats-Unis, entre 1992 et 1998, 5 185 cas de paludisme ont été recensés. Des informations étiologiques étaient disponibles pour 2 964 de ces cas ; 44,6 % étaient liés à une infection par P. vivax, 43,5 % par P. ovale, 2,9 % par P. malariae et 0,07 % par P.ovale. La quasi-totalité des accès liés à P. falciparum sont survenus dans les deux mois suivant le retour de voyage chez des sujets n'ayant pas pris de chimioprophylaxie efficace. En revanche, les accès palustres à P. vivax ou P. ovale ont concerné, dans plus de 62 % des cas, des sujets revenus aux Etats-Unis depuis plus de deux mois (en moyenne 181 jours). Pour 555 des cas sur les 2 822 survenus, une chimioprophylaxie adaptée aux recommandations nationales avait été employée (utilisation de méfloquine, en général).
Le Dr Eli Schwartz (Tel-Aviv, Israël) explique que « lorsque l'on se réfère au cycle infectieux des différents plasmodiums, ce résultat peut s'expliquer facilement. Il existe en effet deux phases de multiplication parasitaires distinctes. La première survient dans les deux premiers mois qui suivent l'infection. Elle se traduit essentiellement par une multiplication des schizontes au niveau hépatique et au sein des érythrocytes. Cette phase est commune à tous les types de plasmodium alors que la seconde, la phase de multiplication hépatocytaire des hypnozoïtes, ne se produit qu'avec P. vivax et P. ovale ». La chimioprophylaxie habituellement prescrite ne permet de lutter que contre la multiplication des schizontes, ce qui explique le taux d'infections retardées en rapport avec P. vivax ou P. ovale, et ce en dépit d'une chimioprophylaxie conforme aux recommandations.
La primaquine seule efficace
Dans un éditorial, le Dr Thomas Wellems (Bethesda, Etats-Unis) fait le point sur les différents traitements préventifs disponibles actuellement pour les voyageurs. Il explique qu' « actuellement dans les pays où il existe des résistances à la chloroquine, les différentes options restent l'association atovaquone-chloroguanide (Malarone), la méfloquine ou la doxycycline. Mais que néanmoins, ces différents traitements ne sont pas actifs contre la phase de multiplication hépatique retardée des hypnozoïtes de P. ovale ou de P. vivax ». Seule la primaquine permet de lutter contre les formes retardées de paludisme, mais cette molécule est mal tolérée (effets indésirables digestifs) et elle ne peut, en outre, être prescrite chez des sujets souffrant de déficit en G6PD. Or le dépistage de ce déficit est financièrement impossible avant la mise en place d'un traitement chimioprophylactique chez les sujets qui se rendent en zone impaludée. Dans ce contexte, le Dr Wellems rappelle l' « urgence de la mise au point de nouveaux traitements antipaludéens destinés à la fois aux personnes se rendant en zone d'endémie et aux sujets qui y vivent ». En outre, il souligne que « le développement de molécules ayant prouvé leur efficacité telles que l'artémisinine devait être favorisé dans les années à venir ».
« New England Journal of Medicine », vol. 349, 16 p. 1496-1498 et 1510-1516, 16 octobre 2003.
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