L A fibrodysplasie ossifiante progressive (FOP), également appelées « maladie de l'homme de pierre », se caractérise par l'ossification progressive des muscles squelettiques. La maladie, très rare, a longtemps été considérée comme une affection sporadique, les parents des malades paraissant indemnes. Des observations plus fines ont toutefois permis de reconnaître, dans certaines familles, chez l'un des parents, des anomalies digitales, notamment au niveau du gros orteil. Ces observations ont fait admettre, pour ces familles, la notion de transmission héréditaire d'un trait de pénétrance variable et, pour les cas purement sporadiques, la notion de mutation de novo.
Plusieurs gènes pourraient être en cause. Le premier a été identifié en 1999. Il s'agit du gène de la noggine, porté par le chromosome 17, dans lequel Gérard Lucotte a pu mettre en évidence une délétion chez un malade (« le Quotidien » du 22 septembre 1999 et du 14 janvier 2000). Peu après, une équipe franco-américaine (Dr Martine Le Merrer) annonçait une liaison de la maladie avec le chromosome 4 (« le Quotidien » du 26 janvier 2000). La même équipe rapportait, en outre, n'avoir observé aucune mutation dans le gène de la noggine chez ses propres patients. Avec la mise en évidence de trois nouvelles mutations dans le gène de la noggine chez des malades espagnols, ce qui a été obtenu est donc en premier lieu une confirmation de l'implication de ce gène, au moins dans certains cas. Ces mutations n'ont en effet été retrouvées dans aucun des 82 chromosomes 17 d'origine méditerranéenne, analysés comme témoins.
Le regroupement, sur un même site, des mutations
Le second point important est le regroupement sur un même site des mutations recensées dans la noggine. Les mutations observées chez les malades espagnols sont, pour deux d'entre elles, des mutations apparemment survenues de novo, qui n'ont pas été retrouvées chez les parents des malades (G92R et G92E). Pour la troisième, il s'agit d'une mutation transmise par le père, qui présentait d'ailleurs lui-même une déformation caractéristique du gros orteil (G91C). Mais quoique d'origine différente, ces trois mutations touchent deux acides aminés adjacents, et tombent par ailleurs exactement dans la délétion décrite en 1999, entre les acides aminés 89 et 94.
Ce site, manifestement essentiel, correspond au site de N-myristoylation de la protéine, c'est-à-dire au point de fixation covalente d'un myristate, acide gras saturé en C14. Cette fixation est reconnue dans un certain nombre de protéines comme un mécanisme régulateur, assurant des fonctions diverses, allant de l'adressage vers les membranes à la facilitation du repliement tridimensionnel.
Dans le cas de la noggine, le rôle de la myristoylation et les conséquences d'une mutation du site récepteur sur la protéine restent à déterminer.
Interaction avec la BMP-4
On peut toutefois supposer que ces conséquences se situent au niveau de l'interaction de la noggine avec la BMP-4 (Bone Morphogenetic Protein), dont le spécialiste américain Frederick Kaplan avait déjà signalé la régulation anormale dans la FOP.
Une piste pour approfondir ces mécanismes est d'ailleurs suggérée en conclusion de l'étude sur les trois malades espagnols : il s'agirait d'exprimer la protéine mutante humaine dans des oocytes de Xenopus, qui exprime, lui aussi, une protéine noggine proche de la protéine humaine.
O. Sémonin et coll. « American Journal of Medical Genetics » 102 : 314-317 (2001).
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature