BEAUTIFUL a inclus 10 917 patients recrutés par 781 centres, dans 33 pays. Ces patients présentaient une coronaropathie documentée et stable, avec fraction d'éjection < 40 % et une fréquence cardiaque > 60 BPM (71,6 BPM en moyenne), cela malgré un traitement standard jugé optimal par le Pr Kim Fox (90 % des patients recevaient des IEC ou sartans, 94 % des antithrombotiques, 74 % des statines et, surtout, 87 % des bêtabloquants) ; 5 479 de ces patients ont reçu, en plus de ce traitement standard, de l'ivabradine (5 mg/j pendant 2 semaines, puis 7,5 mg/j) et 5 438 ont reçu un placebo. Après un suivi médian de 19 mois, les résultats ont été analysés dans la population globale et dans le groupe préspécifié de patients présentant > 70 BPM. Une initiative heureuse car c'est dans ce sous-groupe que l'on observe les résultats les plus intéressants.
En effet, globalement, l'adjonction d'ivabradine ne modifie pas l'indice composite associant mortalité cardio-vasculaire et hospitalisations pour infarctus ou pour apparition ou aggravation d'une insuffisance cardiaque (p = 0,94). L'analyse globale confirme cependant que la tolérance de l'ivabradine est très bonne, ce qui est à souligner compte tenu du fait que 87 % des patients étaient sous bêtabloquants.
La fréquence cardiaque initiale.
L'absence de mise en évidence d'un effet sur l'indice composite peut s'expliquer de diverses manières, comme l'ont souligné les Prs Kim Fox (Londres) et Gabriel Steg (Bichat - Claude-Bernard, Paris). Tout d'abord l'inclusion de patients qui, initialement, avaient une fréquence cardiaque relativement basse ; et, d'autre part, le suivi qui a été relativement court sans oublier l'effet confondant possible d'une dysfonction ventriculaire gauche.
L'influence de la fréquence cardiaque initiale est vraisemblablement déterminante comme le montre l'analyse des résultats observés dans le sous-groupe préspécifié de patients (2 693) présentant à l'inclusion plus de 70 BPM. En effet, si l'on compare ce groupe à celui des patients dont la fréquence cardiaque est inférieure, on observe une augmentation de 46 % du risque d'événements cardio-vasculaires (p = 0,0066). Des résultats qui confirment, il faut le souligner, ceux de nombreuses études antérieures réalisées dans la population générale et chez les coronariens avec ou sans HTA. Toujours dans ce sous-groupe, on note une augmentation significative de la mortalité cardio-vasculaire (34 %, p = 0,0041), des hospitalisations pour insuffisance cardiaque (53 %, p < 0,0001) et des revascularisations (38 %, p = 0,037). À chaque fois que la fréquence cardiaque augmente de 5 BPM, on enregistre une augmentation de la mortalité cardio-vasculaire (8 %, p = 0,0005), des hospitalisations pour insuffisance cardiaque (16 %, p < 0,0001) ou pour infarctus (7 %, p = 0,052) et des revascularisations (8 %, p = 0,34).
Des résultats qui conduisent le Pr Michal Tendera (Pologne) à déclarer que, pour la première fois, on montre de façon prospective que la fréquence cardiaque est un facteur pronostique important quand cette fréquence dépasse 70 BPM.
Procoralan bénéfique au-delà de 70 BPM.
Dans ce sous-groupe de patients présentant plus de 70 BPM, il est à noter que l'ivabradine est beaucoup plus efficace que dans l'analyse globale avec en particulier des réductions significatives du risque d'événements coronariens (– 22%, p = 0,023) d'infarctus du myocarde fatal ou non (– 36 %, p = 0,001) et du recours à des techniques de revascularisation (– 30 %, p = 0,016).
Des résultats qui seront sans doute confirmés par une étude à venir, déclare le Pr Gabriel Steg, qui ajoute que les bénéfices du traitement par ivabradine sont déjà démonstratifs, d'autant plus qu'ils sont obtenus chez des patients bénéficiant déjà, à l'inclusion, d'un traitement standard que l'on peut qualifier d'optimal. Le Pr Kim Fox va plus loin en disant que, d'ores et déjà, l'on peut estimer que chez les coronariens présentant plus de 70 BPM, l'adjonction d'ivabradine diminue fortement le risque de nouvel événement cardio-vasculaire et de recours à la revascularisation. Avec, à la clé, un message clair, la fréquence cardiaque doit être déterminée avec soin chez tous les coronariens afin d'adapter la prise en charge ; à ce sujet, le Pr Tardif (Montréal) reconnaît que cette mesure de la fréquence cardiaque n'est pas simple en pratique, mais que l'on évite beaucoup d'erreurs en appliquant les mêmes règles que pour la pression artérielle.
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