Courrier des lecteurs

Madame, Monsieur, chers patients,

Publié le 19/01/2015
Article réservé aux abonnés

Votre médecin est actuellement en désaccord total avec la loi que veut imposer Marisol Touraine, et les moyens qu’il emploie pour manifester sa désapprobation sont certes gênants (fermeture de cabinet, opposition à la carte Vitale), mais sans commune mesure avec la pagaille provoquée par des trains à l’arrêt, des avions cloués au sol, des écoles fermées ou des routes bloquées par des poids lourds.

Depuis les premières manifestations de 2002, les médecins de terrain, ceux que vous consultez en cas de besoin, signalent à qui veut bien l’entendre que la France va devenir un désert médical de proximité, que les remplaçants et les successeurs sont de plus en plus rares ; à l’époque, seules les revendications sur les prix de la consultation à 20 € et de la visite à 30 € retenaient l’attention de tous ; cela faisait partie de nos préoccupations, avec la paperasserie administrative : les certificats pour tout, les dossiers assurentiels, MDPH, demande d’ALD, invalidité etc. Sans compter les nombreux « papiers » perdus par les caisses dont il faut faire des duplicatas.

Désormais, 12 ans après, vous constatez de vous-même qu’il est difficile de prendre un rendez-vous chez un spécialiste et qu’il vous est difficile de trouver un médecin traitant lorsque vous arrivez dans une ville ou que vous souhaitez un autre avis. Les délais de rendez-vous sont tels qu’on vous répond souvent qu’en cas d’urgence, votre médecin traitant n’a qu’à appeler pour faire avancer les rendez-vous ; du temps perdu, encore du temps.

Vous pouvez aussi constater qu’en douze ans, la consultation est passée de 131 francs à 150 francs, soit 19 francs d’augmentation ; les syndicats de médecins supplient actuellement le gouvernement pour obtenir 2 € de plus soit 13,8 franc ! Aujourd’hui, paieriez-vous une pizza 70 à 100 francs ? C’est pourtant le prix en euros…

Posez-vous les bonnes questions :

- Votre caisse de Sécu est votre assureur premier : vous cotisez pour cela ; mais elle se décharge de plus en plus sur les mutuelles privées ou sur vous-même, pourtant vos cotisations augmentent.

- Votre mutuelle jusque-là facultative et désormais obligatoire, vient en complément ; elle a certes des coûts de fonctionnement inhérents à chaque société ou entreprise française mais à quels niveaux se situent-ils ? Sur 100 € de cotisation, combien sont utilisés pour financer vos soins ?

Qui financent des bateaux sur la route du rhum, des voitures sur le Dakar ? Qui financent les publicités à la télé, la radio ? Qui fait de la pub dans les magazines, les journaux ? Ne souriez pas, c’est juste avec votre argent, qui devrait vous revenir pour vous aider à financer vos lunettes, vos appareils auditifs et vos soins divers.

Une véritable catastrophe

Pensez-vous vraiment que les 2 € d’augmentation vont enfin convaincre les jeunes médecins à s’installer en libéral ? En subissant les contraintes administratives imposées nouvellement tous les ans ?

Cette loi est une véritable catastrophe pour l’avenir de la médecine française de proximité ; l’idée est de créer des maisons de santé pluridisciplinaires, regroupant des praticiens sous tutelle de l’État qui en disposera à sa guise. Sous prétexte de donner l’accès aux soins à tous ? Mais stop ! C’est de la politique pure ! Aucun plan de vision sanitaire n’est prévu, prenant en compte la démographie médicale, les actions de préventions toujours plus nombreuses, les dépistages organisés etc. ! Tout ceci est bien beau quand il y a des praticiens de terrain ! Dans le cas contraire, c’est une augmentation des délais de prise en charge, des retards de diagnostic etc.

Que vos caisses de Sécu soient gérées correctement et que vos mutuelles utilisent votre argent pour vos soins ! Ne vous trompez pas d’adversaire !

Une déplaisante impression

J’ai eu la déplaisante impression d’une désinformation voulue à l’écoute du journal de 20 heures sur France 2, le 6 janvier : un reportage présenté discréditait l’intégrité des médecins qu’ils soient généralistes, spécialistes, professeurs hospitaliers renommés.

Le reportage commençait accusateur « vos médecins » perçoivent des « pots de vin » des laboratoires, incitant à aller le vérifiez sur Internet (base de données publique transparence santé), puis continuait en insinuant que tous les médecins, même les médecins généralistes, sont invités régulièrement par les laboratoires à des repas d’un montant de 60 € ou plus, des séminaires payés intégralement et des conférences leur rapportant entre 3 000 € et 90 000 €/an.

Il était sous entendu que toutes les réunions proposées aux médecins par un laboratoire sur un sujet médical ne le sont que par vénalité ? Serions-nous plus sous influence des lobbyings que les journalistes, les hommes politiques, nos députés surtout européens ?

Je constatais également que France 2 parlait de ce que gagnent les médecins, sans préciser s’il s’agit de brut (attention ce n’est pas un salaire brut mais un chiffre d’activité) ou en net. Mélange-t-elle consciemment ces notions ?

La chaîne par cette intervention n’est-elle pas sous l’influence du gouvernement, ne joue-t-elle pas son jeu en discréditant les médecins aux yeux des Français pour qu’ils approuvent le projet de loi de notre ministre de la Santé ?

La liberté du journalisme existe-t-elle réellement ? Les journalistes xercent-ils leur métier avec partialité en limitant leurs interviews aux syndicats médicaux agréés par l’État ? Qui est reçu par la ministre et est interviewé par les médias ? En priorité MG-France, puis la CMSF et non les autres syndicats SML, FMF, pourquoi ?

Dr Denis Roy Saint-Rambert-d’Albon (26) Dr Jean Hvostoff Les Molières (91)

Source : Le Quotidien du Médecin: 9379