DE NOTRE ENVOYÉE SPÉCIALE
MERCREDI dernier, 15 heures : l'agitation gagne les couloirs du service immunologie, aux Hospices civils de Lyon.
Dans une heure, Ségolène Royal sera sur place avec tout son staff pour une visite de campagne. La sécurité patrouille pour vérifier que tout est en ordre. Déjà, des journalistes arrivent, calepin à la main. « Le Quotidien » est allé à la rencontre de l'équipe soignante, pour recueillir ses commentaires sur la campagne électorale. Un échange s'improvise dans une salle de réunion.
D'emblée, les infirmières et les aides-soignantes affichent leurs désillusions. «Ni la gauche ni la droite ne changera notre quotidien», affirme d'une seule voix la petite équipe. «Vingt années de travail et de vote n'ont rien changé», se désole Anne Tonoli, cadre infirmier.
La santé en général, et l'hôpital en particulier, est absente des débats. «Je ne me sens pas du tout concernée par les discours des différents candidats», déplore Sandrine Royer, aide-soignante.
La liste des revendications est pourtant longue : un meilleur salaire – une aide-soignante débute avec le Smic –, des horaires plus souples – avec des heures supplémentaires, pourquoi pas, mais à condition qu'elles soient payées –, un treizième mois, une meilleure retraite. Et un nouveau cap pour l'institution, avec moins de pression financière : «Plus on fait de patients, plus on a de sous avec la tarification à l'activité: c'est pervers», observe la cadre infirmier, Anne Tonoli. «La rentabilité n'a pas à entrer à l'hôpital», enchaîne Fatiha Bouzemboua, aide-soignante.
Le chef de service est sur la même longueur d'onde : «Si la droite gagne, le libéralisme appliqué à la santé conduira à la mort de l'égalité dans l'accès aux soins», déclare le Pr Jean-Louis Touraine. «Seule Ségolène Royal s'est engagée concrètement pour l'hôpital», ajoute ce professeur politiquement engagé, premier adjoint au maire de Lyon (socialiste). Ses confrères hospitaliers, globalement, se situent plutôt à droite. «Les clivages restent marqués, mais les discussions entre médecins sont plus respectueuses que par le passé», raconte le Pr Touraine, qui sourit à l'évocation de la réaction de praticiens en mai 1981 : «Certains, au lendemain de l'élection, ont pris contact avec l'Argentine pour s'expatrier.»
Une interne croisée entre deux consultations précise que la politique reste taboue à l'hôpital. «On n'en parle pas en salle de garde, ça évite les conflits.» Son vote ira à Ségolène Royal, sans hésiter : «Les étudiants en médecine sont plutôt à droite, mais, si la droite passe, ce sera une catastrophe pour l'accès aux soins», précise la future néphrologue. Moins convaincu, un praticien du service hésite : «Les deux camps vont dans le sens d'une maîtrise des dépenses», dit-il.
Dans ce service d'immunologie, le personnel non médical votera à gauche, mais sans grande conviction. La venue de Ségolène Royal, son long entretien avec un patient atteint du sida, ses propositions, n'auront pas rassuré Nicole Bongiovanni, maître ouvrier : «J'ai trouvé Ségolène Royal abordable, souriante, confie-t-elle après coup. Mais elle ne pourra pas faire de miracle.»
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