Contrairement aux idées reçues, l’urticaire chronique ne témoigne que rarement d’une origine allergique mais découle le plus souvent d’une préactivation, acquise ou innée, des mastocytes...
Maladie de peau généralement bénigne, l’urticaire est très fréquente, 1 à 3 % des Français ayant un terrain d’urticaire chronique. Spontanément ou après un effort, un stress, un aliment ou un médicament, ces sujets développent de temps à autre des lésions d’urticaire à type de papules plus ou moins disséminées, de prurit et/ou des œdèmes, le plus souvent sur le visage ou sur les mains. Cette réaction est due à une fragilité des mastocytes dans le derme qui, préactivés, « ?éclatent?» à la moindre sollicitation et libèrent de l’histamine, produisant la lésion d’urticaire.
« Deux grandes causes expliquent cette préactivation des mastocytes et, partant, l’urticaire chronique, observe le Pr Jean-François Nicolas (CH de Lyon Sud). D’une part, un terrain auto-immun spécifique : les patients ont fabriqué des anticorps contre les récepteurs de surface des mastocytes. D’autre part, l’atopie où les mastocytes sont préactivés par des facteurs allergiques comme la poussière de maison ou les pollens chez des personnes qui ont (ou ont eu) par ailleurs une rhinite, une conjonctivite ou un asthme.?» Dans les deux cas, les mastocytes sont alors suffisamment fragiles pour être activés par l’ingestion d’un médicament (les facteurs les plus toxiques pour les mastocytes), d’un aliment, etc. Il s’agit alors de réactions d’hypersensibilité et non de véritables réactions allergiques.
Hypersensibilité ou allergies médicamenteuses ?
« Le médicament est la première victime de la confusion des genres, entre allergie et urticaire », regrette le Pr Nicolas ; seulement 5?% des urticaires médicamenteux isolés étant d’authentiques allergies. Ce que les patients (et leur médecin !) décrivent comme une allergie, voire un œdème de Quincke, est presque toujours un simple œdème du visage, témoin d’une urticaire médicamenteuse, et l’on se prive ainsi, à noter en rouge et en gras sur le carnet de santé, “Allergie à l’amoxicilline” par exemple, de tout un pan de la pharmacologie et des antibiotiques en particulier qui pourraient être précieux.
Si allergie à l’amoxicilline il y a, des anticorps IgE spécifiques sont présents à la surface des mastocytes des muqueuses (digestives et respiratoires), de la peau et des basophiles sanguins. L’amoxicilline absorbée traverse la barrière intestinale, rencontre ces récepteurs IgE… Les réactions sont alors forcément systémiques : «?Une urticaire isolée sans signe digestif ou respiratoire (bronchospasme) n’est donc a priori pas de l’allergie et un gonflement des lèvres après ingestion d’un antibiotique ou d’un anti-inflammatoire doit être considéré comme une urticaire du visage », précise le Pr Nicolas. Une exception à cette règle, l’allergie de contact, au latex notamment, où les lésions sont limitées à la peau, puisque de contact. Un interrogatoire poussé suffit pour faire la part des choses, éventuellement complété au moindre doute par une consultation allergologique pour écarter une allergie authentique. L’allergologue?confirme,?dans l’immense majorité des cas, le caractère non allergique de l’urticaire. La différence se fait aussi sur le délai, une réaction allergique étant immédiate et immédiatement sévère en quelques minutes.
Antihistaminique plutôt qu’éviction
« La presque totalité (95?%) des patients qui font de l’urticaire à un médicament peuvent par conséquent y recourir à nouveau, avec une parfaite tolérance, à condition de prendre au moins trois heures avant le médicament “histaminolibérateur“ un comprimé d’un antihistaminique de dernière génération, et ce jusqu’au lendemain de la dernière prise », suggère le Pr Nicolas.
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