UNE EQUIPE de l'université de Zurich vient de mettre en évidence un polymorphisme génétique responsable de modifications de la durée et de l'intensité du sommeil profond. Ce polymorphisme touche le gène ADA, un gène impliqué dans le métabolisme de l'adénosine. Rétey et coll. ont démontré que les individus porteurs de cet allèle particulier du gène ADA dorment « mieux » que les autres : la durée de leur sommeil lent profond est allongée et la « profondeur » de leur sommeil est augmentée. Des études complémentaires permettront de déterminer si certains polymorphismes de ADA sont à l'origine de troubles du sommeil.
Il n'existe aujourd'hui pratiquement aucune donnée relative aux mécanismes moléculaires impliqués dans l'homéostasie du sommeil. Cependant, diverses observations ont déjà suggéré que l'adénosine et ses récepteurs A1 et A2A devaient participer à la régulation du sommeil : chez la souris, les polymorphismes d'une région génomique contenant deux gènes impliqués dans le métabolisme de l'adénosine ont été associés à des modifications de l'homéostasie du sommeil. Un de ces deux gènes, le gène ADA, code pour l'adénosine désaminase. Il est exprimé dans les aires cérébrales associées à la régulation du sommeil. De plus, il a été observé que l'administration locale d'un inhibiteur de la protéine ADA conduit, chez le rat, à une augmentation de la durée du sommeil lent profond.
Ces observations ont conduit Rétey et coll. à s'intéresser au rôle du gène ADA dans la régulation du sommeil humain.
L'homéostasie du sommeil.
Plus de 30 allèles du gène ADA humains ont été recensés. Certains de ces variants codent pour des protéines non fonctionnelles, à l'origine d'immunodéficiences sévères combinées. Mais le polymorphisme le plus fréquent est asymptomatique chez les porteurs hétérozygotes. Il touche le nucléotide 22 et correspond à une transition G vers A. Dans la population caucasienne, 88 à 92 % des individus ont un génotype ADA G/G et 8 à 12 % le génotype asymptomatique G/A.
Rétey et coll. ont fait l'hypothèse que ce polymorphisme pouvait affecter l'homéostasie du sommeil. Pour tester leur hypothèse, les chercheurs ont recruté une centaine de volontaires, tous bons dormeurs, et ont procédé au typage de leur gène ADA. Près de 11 % des volontaires portaient le polymorphisme G/A.
Les chercheurs ont ensuite comparé le sommeil des volontaires G/G à celui des volontaires G/A. Il est apparu que le génotype G/A est associé à un meilleur sommeil subjectif : les volontaires G/A ont le sentiment de mieux dormir et de se réveiller moins souvent que les volontaires G/G.
Allongement du sommeil lent profond et du sommeil paradoxal.
Des mesures objectives du sommeil ont confirmé le ressentit des volontaires : Le génotype G/A est associé à un allongement de la durée du sommeil lent profond et du sommeil paradoxal. Le polymorphisme G vers A augmente en outre l'intensité du sommeil. Des modifications similaires de l'architecture du sommeil sont observées chez les personnes qu'on laisse s'endormir après une longue privation de sommeil.
Ce travail confirme donc l'hypothèse selon laquelle le système adénosinergique agit sur l'homéostasie du sommeil. Cette découverte pourrait conduire au développement de nouveaux médicaments destinés aux traitement des troubles du sommeil ou, au contraire, à la stimulation de la vigilance.
J.V. Rétey et coll., « Proc Natl Acad Sci USA », édition en ligne avancée.
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> ...l'autre, celui de récepteur bêta de l'acide rétinoïque
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