Arts
L'éblouissant Nicolas de Largillière
On connaît mal ce peintre dont la vie et l'uvre couvrent à la fois la fin du XVIIe siècle et la première moitié du XVIIIe, à la fois le « Grand Siècle » et la Régence. Depuis 1928, aucune exposition n'avait été consacrée à Nicolas de Largillière (1656-1746). Le musée Jacquemart-André se charge talentueusement de réparer cette lacune en présentant une soixantaine d'uvres rares et remarquables de l'un des artistes les plus féconds et inspirés de son temps.
Les uvres de Largillière ont ceci de singulier qu'elles correspondent particulièrement au goût français de l'époque, tout en puisant leur influence dans la manière flamande (le peintre a été formé à Anvers) et dans le raffinement anglais (il fit un séjour en Angleterre où il côtoya la Cour de Charles II).
Largillière est un éclectique. A la première salle de l'exposition où compositions allégoriques (commandes des échevins de la ville de Paris, entre autres) et le très beau « Paysage sylvestre » (presque exubérant) dominent succèdent les étonnantes peintures historiques et mythologiques que Largillière a dotées d'un souffle mystérieux, d'un tragique lumineux. Le peintre excelle également - et c'est pour ces deux genres qu'il acquit ses « lettres de noblesse » - dans le dessin (surprenants croquis de visages), les natures mortes et surtout les portraits, dans lesquels il se permet des audaces de coloris, jouant avec la matière, qu'il maîtrise amplement.
La variété des compositions, la touche aérienne, et souvent pleine d'humour, de son pinceau et la douceur qui règne dans ses toiles font de l'art de Largillière un chapitre éblouissant de l'histoire de l'art. L'exposition du musée Jacquemart-André sert et célèbre admirablement ce peintre éclairé.
« Nicolas de Largillière, peintre du Grand Siècle ». Musée Jacquemart-André. 158, boulevard Haussmann. Paris 8e. (Nocturne le lundi soir). Tél. 01.45.62.11.59. Jusqu'au 30 janvier 2004.
François Boucher, le crayon souverain
Deux expositions rattachées l'une à l'autre présentent les dessins de François Boucher (1703-1770), dont l'art ne fut longtemps perçu que comme la transition entre la grâce et le charme de Watteau et l'originalité de Fragonard. Il serait réducteur de ne considérer l'uvre de Boucher et son apport à l'histoire de l'art que comme une passerelle entre deux styles. Boucher est aussi un artiste libre et créatif.
L'Ecole nationale supérieure des beaux-arts (ENSBA) présente une série de dessins de Boucher et de ses contemporains, fonds du XVIIIe siècle provenant à la fois de l'Académie royale de peinture et de sculpture (fondée par Louis XIV en 1648) et de diverses donations. L'exposition s'attache à illustrer les manifestations de l'art rocaille, fameux style artistique qui domina en France du début du XVIIIe siècle jusque vers 1760, et dont le prolongement outré fut le rococo.
Boucher fut l'un des initiateurs et, par là même, l'un des meilleurs représentants de l'art rocaille. Ses dessins, gracieux et érotiques, représentent des mythologies compliquées, des allégories, des sujets galants ou libertins, aussi bien le visage accorte de Madame de Pompadour sa protectrice que des scènes intimes, dans lesquelles le baroque des étoffes, les délicats motifs et décors d'ornement font jouer des lignes courbes et sinueuses, et s'aventurent parfois dans une légère dissymétrie des formes.
Boucher a toujours goûté à l'éclectisme. La variété des dessins de l'exposition le prouve.
Projets pour peintures religieuses et historiques, scènes de genre, études préparatoires pour frontispices, paysages bucoliques complètent ce bel ensemble d'uvres graphiques, dans lesquelles la perfection académique côtoie l'audace. Des esquisses de Edme Bouchardon, Michel-François Dandré-Bardon, Etienne Jeaurat, Pierre-Charles Trémolières, Charles Joseph Natoire et Pierre Subleyras sont également à remarquer pour la touche moelleuse et charnelle de certaines d'entre elles.
En s'appuyant sur des dessins, pour la plupart inédits, provenant des collections publiques de France, le musée du Louvre propose lui aussi un regard neuf sur l'uvre de Boucher, trop souvent cantonnée au style galant et à une image convenue. Un choix parmi quelques-unes des plus belles feuilles du « Boucher d'hier » (c'est-à-dire l'artiste connu et largement révélé) et du « Boucher d'aujourd'hui » (la part de l'artiste la moins explorée), permettra au visiteur de découvrir 80 des dessins du Premier peintre du roi qui, à la fin de sa vie, approfondira encore les explorations techniques (plume, encre brune, clair-obscur...) et adoptera un vocabulaire néoclassique inédit jusqu'alors dans son pinceau.
« François Boucher et l'art rocaille ». Ecole nationale supérieure des beaux-arts. 13, quai Malaquais. Paris 6e. Tél. 01.47.03.50.00. Jusqu'au 21 décembre. Catalogue, 500 pages environ, 33 euros, éd. ENSBA. A noter, l'exposition annexe « Rococo & Co », à l'ENSBA, réalisations des élèves de l'école. Et « François Boucher, hier et aujourd'hui ». Musée du Louvre. Aile Sully, 1er étage, salle de la Chapelle. Paris 1er. Tél. 01.40.20.51.51. Jusqu'au 19 janvier 2004. Catalogue, 160 pages, 35 euros, éd. RMN.
L'esquisse peinte ou l'apothéose du geste
« L'apothéose du geste », première exposition consacrée par des musées français à l'esquisse peinte, invite à redécouvrir la peinture d'invention du XVIIIe siècle, celle de Fragonard, Boucher et David, ainsi que celle de grands peintres moins révélés tels Vincent, Doyen, Pierre ou Hallé. La présentation d'une centaine d'esquisses, dont certaines sont en confrontation avec le tableau dans sa version définitive, permet, en outre, d'avancer dans la connaissance du processus de création.
C'est à Venise que l'esquisse peinte s'est d'abord répandue, en particulier dans l'uvre de Titien et celle de Rubens, dont l'influence fut de poids sur les artistes français du XVIIIe siècle. C'est avec Le Brun que cette pratique s'affirme pleinement. Lemoyne et de Troy poursuivront les recherches dynamiques et colorées, relayées par la génération brillante des peintres nés autour de 1700 (Boucher, Van Loo, Natoire) qui l'illustrent magistralement. Fragonard portera l'esquisse peinte à son zénith, grâce à sa facture enlevée et à son traitement délicat des formes. Une exposition passionnante.
« L'apothéose du geste ». Musée des Beaux-Arts. 18, place François-Sicard. 37000 Tours. Renseignements : 02.47.05.68.73. Jusqu'au 11 janvier 2004. Catalogue, 255 pages, 39 euros, éd. Hazan.
Et aussi
- A Fontainebleau (musée national du château) et à Versailles (musée du château) : Animaux d'Oudry, collections des ducs de Mecklembourg-Schwerin. Jusqu'au 9 février 2004.
- A New York (Frick Collection) : les dessins de Boucher. Jusqu'au 14 décembre.
- A Washington (National Gallery of Art) : l'époque de Watteau, Chardin et Fragonard. Jusqu'au 11 janvier 2004.
- A Cologne (Wallraf-Richartz Museum) :
les peintres à Dresde au XVIIIe siècle. Jusqu'au 18 janvier 2004.
A venir
- Au Louvre : Jean-Honoré Fragonard, dessins du Louvre. A partir du 3 décembre
- A Dijon (musée Magnin) : Boucher et les nordiques. Du 15 juin au 15 août 2004 (sous réserve).
- Au Texas, à Forth Worth (Kimbell Art Museum) : les génies du rococo français, dessins et peintures mythologiques de Boucher. Du 18 janvier au 18 avril 2004.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature