DEPUIS PLUSIEURS SEMAINES, l'Union des médecins spécialistes (Umespe) intensifie son mouvement de revendication. Le syndicat déplore la situation de blocage de la réforme et s'interroge sur l'avenir des médecins spécialistes. Mais pour la première fois, mercredi, son président, le Dr Jean-François Rey, a haussé le ton. « Ulcéré » de ne rien voir venir depuis des mois, il a indiqué au cours d'une conférence de presse qu'il attendait que les intérêts des spécialistes soient davantage défendus par la Csmf, dont l'Umespe fait partie.
C'est dans des termes sans équivoque que le Dr Jean-François Rey a exprimé son mécontentement: « Nos adhérents ne se reconnaissent plus dans le discours de la Csmf. La Csmf doit être un syndicat de combat et non d'accompagnement gouvernemental, qui n'apporte rien aux médecins spécialistes. Nous avons accepté le RCM en août, on nous a dit que nous serions partenaires de la réforme mais nous n'y croyons plus. » Jean-François Rey, confédéré depuis son installation en 1978, dit ne pas remettre en cause l'affiliation de l'Umespe à la Csmf. C'est la ligne de conduite du président de la Csmf qu'il veut revoir : « Michel Chassang a très bien défendu les intérêts des médecins généralistes, il y a deux ans. Il doit maintenant prendre en compte l'incompréhension des adhérents spécialistes. » Pour le Dr Rey, « la médecine libérale doit être défendue de manière plus pugnace par les syndicats ».
Chassang ne veut pas polémiquer.
Très surpris par la prise de position du président de l'Umespe, à laquelle il ne s'attendait pas, Michel Chassang ne souhaite pas engager de polémique: « Jean-François Rey exprime son désarroi et son impatience. Je comprends les difficultés rencontrées par les médecins spécialistes et je fais miennes leurs revendications. Je rappelle toutefois que la Csmf n'est ni l'Umespe ni l'Unof et que je ne suis sous la tutelle de personne. »
Le président de la Csmf n'a pas souhaité commenter le rapprochement entrepris ces dernières semaines par l'Umespe et l'Union collégiale des chirurgiens et spécialistes français (Uccsf), pour défendre notamment les spécialistes des réanimations médicales de type Upatou (unité de proximité, d'accueil, de traitement et d'orientation des urgences) : « L'Umespe se rapproche avec qui elle veut », dit-il.
Les raisons de la colère.
Après l'annulation d'une réunion, qui devait avoir lieu la semaine prochaine, du comité de pilotage sur la nomenclature des actes cliniques, au motif qu' « il n'y avait rien de nouveau à l'ordre du jour », Jean-François Rey a estimé qu'il était temps de réagir. « Après dix ans d'absence de dialogue, nous souhaitons une lisibilité immédiate de la réforme en cours et des engagements précis et immédiats pour les médecins spécialistes », a rappelé le Dr Rey, qui souhaite profiter de la période électorale « pour demander des comptes au gouvernement ». Le Dr Rey a rappelé sa crainte de voir disparaître différentes spécialités de médecine libérale. Et le gastro-entérologue de prendre en exemple le métier de chirurgien « qui s'est paupérisé, dont le nombre de postes vacants est aujourd'hui énorme, obligeant le recrutement de médecins étrangers pour pallier le manque de vocations... ».
Aux yeux du Dr Rey, le gouvernement ne manifeste « aucun intérêt pour les disciplines en difficulté ». Pas de revalorisation des actes depuis plus de huit ans pour certaines spécialités, aucune solution intéressante pour régler le problème de la RCP - « le rapport de l'Igas ne nous encourage pas »... Le Dr Rey évoque une possible réouverture des négociations avec les caisses là où elles avaient été laissées l'année dernière. Il précise que les spécialistes sont prêts à s'engager à répondre à des démarches de qualité, à l'évaluation des pratiques professionnelles et à la formation médicale continue. Le président de l'Umespe envisage toujours l'existence de contrats négociés collectivement par les spécialistes avec des mutuelles ou des assureurs privés pour obtenir une marge d'honoraires supplémentaires en contrepartie de ces engagements.
L'Umespe a rappelé qu'elle était favorable à la création d'espaces de liberté tarifaire « pour remettre les compteurs à zéro ». Mais elle exclut une ouverture brutale du secteur II qui conduirait « à une concurrence sauvage, à l'américaine ».
Les prochains jours risquent d'être agités au 79, rue de Tocqueville, à Paris, siège de la Csmf et de l'Umespe. D'autant que le calendrier prévoit des rendez-vous importants pour les deux syndicats : le conseil confédéral de la Csmf se tiendra le 21 février, tandis que le comité directeur de l'Umespe se réunira le 14 mars. Une semaine avant l'assemblée générale de la Csmf (21 et 22 mars). Michel Chassang a pris note des revendications des spécialistes: « L'Umespe presse la Csmf de faire en sorte que les choses avancent plus rapidement. J'enregistre. »
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