De notre correspondante à New York
PARMI les techniques de surveillance foetale actuelles, la plus largement utilisée est l’enregistrement du rythme cardiaque foetal (RCF) ou monitorage foetal électronique. On espérait que cette technique, introduite dans les années 1970, par suspicion d’anoxie foetale aiguë, et suivie d’un accouchement rapide, pourrait réduire l’incidence des lésions neurologiques. Toutefois, l’évaluation rigoureuse de cette technique, à la fin des années 1980, n’a montré aucun bénéfice. Son interprétation est controversée. Certains pensent que son utilisation est l’un des facteurs responsables de l’escalade des césariennes aux Etats-Unis (près de 30 % des accouchements en 2004).
Pour remédier aux limites du monitorage foetal, a été développée, à la fin des années 1980, une technique qui permettait de mesurer continuellement la saturation en oxygène du foetus : l’oxymétrie du pouls foetal.
La procédure consiste à insérer, à travers le col dilaté après rupture des membranes, un capteur spécialisé, qui est positionné sur la tête foetale. En contact avec la peau, le dispositif permet de mesurer la saturation en oxygène du foetus durant le travail.
Cette oxymétrie est disponible sur le marché français depuis 1995. En 2000, le dispositif OxiFirst a été approuvé de façon conditionnelle par la FDA (Food and Drug Administration) comme technique d’appoint au monitorage foetal électronique. L’autorisation repose principalement sur une étude multicentrique contrôlée portant sur 1 010 femmes en travail, qui présentaient un rythme cardiaque foetal non rassurant.
Dans cette étude, l’utilisation de l’oxymétrie foetale a montré une réduction du taux des césariennes pour suspicion de souffrance foetale de 10 % à 4,5 %. Toutefois, de façon inattendue et inexpliquée, le taux des césariennes pour dystocie dans le groupe oxymétrie a été multiplié par deux, ce qui a donné un taux global de césariennes similaire dans les deux groupes.
Puisque ces résultats étaient loin d’être probants, Bloom et coll. ont conduit une étude multicentrique américaine (14 hôpitaux universitaires), publiée cette semaine.
Oxymétrie soit « masquée », soit « ouverte ».
Elle porte sur 5 342 primipares à terme. Au début du travail, elles ont été affectées par randomisation à l’oxymétrie du pouls foetal soit «masquée», soit «ouverte». Dans le groupe masqué, la saturation en oxygène était cachée au médecin ; il la connaissait dans le groupe ouvert. L’objectif principal était de mesurer la réduction du taux global de césariennes.
Les résultats de l’étude sont décevants. La connaissance de la saturation en oxygène du foetus (SpO2) n’a pas réduit les taux de césariennes (environ 27 % dans les deux groupes), de forceps ou de ventouse, aussi bien dans la population générale (5 342 femmes) que dans le sous-groupe des femmes avec rythme cardiaque foetal non rassurant (2 168 femmes).
Le taux des césariennes pour suspicion de souffrance foetale (ou rythme cardiaque non rassurant) est le même dans les deux groupes (7 %), ainsi que le groupe pour dystocie (19 %). Enfin, l’état des nouveau-nés ne diffère pas entre les deux groupes.
L’étude, initialement prévue pour inclure 10 000 femmes, a été arrêtée précocement, lorsqu’il est devenu évident que connaître la saturation en oxygène du foetus ne réduisait pas le taux des césariennes ni n’améliorait l’état du nouveau-né.
« New England Journal of Medicine », 23 novembre 2006, pp. 2195 et 2247.
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