« BLINDNESS » (l'aveuglement), un titre qui est à lui seul un diagnostic, celui du roman du prix Nobel portugais José Saramago dont il est adapté (1997, Éditions du Seuil). C'est le réalisateur brésilien Fernando Meirelles, auteur de « la Cité de Dieu », qui a dirigé cette coproduction nippo-canadienne tournée en anglais.
L'aveuglement brutal dont sont victimes les habitants d'une grande métropole non identifiable (non européenne, selon les voeux de Saramago) est dû à une épidémie qui se propage à grande vitesse. Les adaptateurs ont pensé au sras de 2003, les Canadiens n'ayant pas oublié que Toronto a alors été «stigmatisée lorsque l'OMS diffusa un avertissement sans précédent dissuadant les voyageurs de s'y rendre». Ils font aussi référence aux violations des droits de l'homme qui ont suivi des catastrophes comme celles du tsunami en Asie ou de l'ouragan Katrina à La Nouvelle-Orléans.
Les victimes du « mal blanc » sont donc enfermées dans des conditions épouvantables dans un ancien hôpital, quasi abandonnées de tous. Elles recréent alors une société dans laquelle règnent, par la violence, les plus forts et les plus malins. On a déjà vu cela souvent, ce qui n'enlève rien à la force de la métaphore ni à la très grande vraisemblance psychologique de la montée de l'inhumanité quand les règles du consensus social disparaissent. Après un début impressionnant et très maîtrisé – Meirelles sait faire monter l'angoisse –, la suite est sans grande surprise et non sans lourdeurs. Dont les acteurs ne sont pas les complices mais les victimes (Julianne Moore, Mark Ruffalo, dans le rôle de l'ophtalmologue qui ne voit plus, Danny Glover, Gael Garcia Bernal). > R. C.
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